Mayotte : Violences urbaines et pillages après qu'un homme a été mortellement neutralisé par la police

Un homme de 52 ans est décédé après avoir été touché par le tir d'un policier ce dimanche à Kawéni, une agglomération rattachée à la commune de Mamoudzou à Mayotte. Il a été neutralisé alors qu'il était en train d'attaquer un autre homme lors d'une intervention de police.
Par Actu17
Le lundi 24 février 2020 à 12:00 - MAJ lundi 24 février 2020 à 15:23

Les policiers de la Brigade anticriminalité (BAC) étaient en patrouille ce dimanche peu avant midi (heure locale) lorsqu'ils sont passés sur le boulevard Younoussa Bamana à Kawéni avant d'être sollicités par un groupe de personnes, qui leur a demandé de s'arrêter.

Les deux fonctionnaires sont descendus de leur véhicule et ont constaté la présence d'un homme au sol âgé d'une quarantaine d'années, qui hurlait de douleurs et qui présentait des plaies saignantes au visage et aux bras indique une source policière. Les forces de l'ordre ont immédiatement fait appel aux secours.

Dans le même temps, plusieurs témoins leur ont expliqué que la victime venait d'être percutée par le conducteur d'une voiture de type Renault Scenic, qui avait ensuite pris la fuite. Selon ces témoignages, l'auteur des faits connait la victime et aurait agi dans le cadre d'un différend concernant un banga et un terrain situés non loin du lieu des faits. D'autres sources évoquent une rixe entre plusieurs personnes.

Un individu surgi et frappe le témoin avec une matraque télescopique

L'un des policiers a prodigué les premiers soins à la victime qui était consciente tandis que le second s'est dirigé un peu plus loin pour s'assurer qu'il n'y avait pas d'autres blessés. Le policier est alors tombé sur un autre témoin qu'il a commencé à interroger.

C'est alors qu'un individu a surgi et a porté des coups à ce dernier au niveau de la tête avec une matraque télescopique selon cette même source. L'agresseur a refusé de lâcher son arme lorsque le policier lui a demandé et a continué à frapper la victime qui saignait. Le fonctionnaire a alors fait feu à une reprise avec son arme de service selon une source proche de l'enquête. Le suspect de 52 ans a été touché au niveau de l'abdomen et s'est effondré.

Les sapeurs-pompiers qui venaient d'arriver sur place pour s'occuper de la victime qui aurait été percutée par une voiture, se sont dirigés vers le blessé par balle qui perdait du sang. Le SMUR a aussi été appelé. Le quinquagénaire est décédé quelques heures plus tard.

Des violences urbaines durant la nuit

Suite à cette affaire, des violences urbaines ont éclaté dans la commune et plusieurs magasins ont été pillés, notamment les enseignes Tati et La Snie. Un barrage a également été installé sur la route principale et des automobilistes ont été pris à partie.

Policiers et gendarmes, qui ont utilisé des véhicules blindés de type Berliet VXB 170, ont travaillé tout au long de la soirée pour ramener le calme et faire cesser ces exactions. Un calme qui n'est revenu qu'au milieu de la nuit, de façon précaire.

Le policier en garde à vue

Le policier qui a fait feu a été placé en garde à vue. Il est interrogé par les gendarmes de la section de recherches dans le cadre d'une enquête ouverte pour homicide volontaire.

Une seconde enquête judiciaire a été ouverte pour violences volontaires aggravées concernant la victime qui aurait été percutée par une voiture. Les investigations ont été confiées au commissariat de police local.

"C’est une intervention dans un contexte extrêmement tendu"

De son côté, Cédric Boyer, délégué national outre-mer du syndicat Alliance police nationale appelle à ne pas "tirer de conclusions hâtives dans cette affaire". "Notre collègue intervient seul, dans un quartier où la délinquance et la criminalité explosent, pendant qu’un second porte assistance à une victime qui s’est faite percuter par un véhicule", explique le syndicaliste.

"C’est une intervention dans un contexte extrêmement tendu, le policier doit prendre une décision en une fraction de seconde face à un individu dangereux, déterminé et armé qui agresse violemment un témoin dont notre collègue prenait les déclarations", a-t-il poursuivi.

"Il faut laisser aux enquêteurs le temps de travailler et d’apporter tous les éléments qui mettront en évidence le fait que s’il n’était pas intervenu, le témoin aurait pu être tué à coup de matraque télescopique. Tous les éléments à ce jour nous laissent penser que les caractéristiques de la légitime défense semblent réunis", a ajouté Cédric Boyer, précisant que son organisation syndicale mettait "tout en œuvre pour qu’il [le policier] soit défendu correctement".

Une "situation catastrophique en outre-mer depuis des années"

Le délégué syndical que nous avons contacté est également revenu sur la situation très difficile en outre-mer : "Cette affaire doit faire ouvrir les yeux à notre Ministre sur la situation catastrophique en outre-mer depuis des années".

"Cela fait plusieurs années que nous demandons des renforts et des moyens conséquents pour que nos collègues puissent travailler en toute sécurité et ainsi pouvoir protéger les personnes et les biens de la meilleure façon d’un point de vue opérationnel", a-t-il insisté.