
La plaque installée dans le jardin Arnaud Beltrame à Paris, en l’honneur du gendarme tué à Trèbes (Aude), fait l’objet de vives critiques.
Inaugurée le 26 février dernier dans le IIIe arrondissement de Paris, la plaque en hommage au lieutenant-colonel Arnaud Beltrame, le gendarme de 44 ans assassiné lors des attentats de Trèbes et de Carcassonne le 23 mars 2018, fait beaucoup réagir depuis ce week-end.
Il est notamment écrit qu’Arnaud Beltrame a été « victime de son héroïsme ». Une tournure ciblée par les critiques, qui suggère que le militaire a perdu la vie par sa propre faute. Le lieutenant-colonel s’était substitué à une otage lors de l’attaque de Trèbes, au terme d’une négociation avec le terroriste Redouane Lakdim. Ce dernier avait peu après tué le gendarme d’un coup de couteau à la gorge.
Une polémique qui intervient près de sept mois après l’installation de la plaque commémorative, alors que des discussions autour du projet de loi destiné à lutter contre le séparatisme et l’islam radical, devant être présenté en décembre prochain au Conseil des ministres, ont débuté.
« Une insulte à sa mémoire »
Pour le président du Centre d’Analyse du Terrorisme (CAT), Jean-Charles Brisard, il s’agit d’«une insulte» en la mémoire d’Arnaud Beltrame. La présidente du Rassemblement national (RN), Marine Le Pen, estime pour sa part que c’est « révoltant ». « C’est le fondamentalisme islamiste qui l’a assassiné. Anne Hidalgo s’honorerait à faire modifier cette phrase qui choque nombre de Français », ajoute-t-elle.
C’était passé inaperçu quand la plaque avait été dévoilée : suggérer qu’Arnaud #Beltrame aurait été victime de lui-même est révoltant. C’est le fondamentalisme islamiste qui l’a assassiné. @Anne_Hidalgo s’honorerait à faire modifier cette phrase qui choque nombre de Français. MLP https://t.co/qljW89RYoD
— Marine Le Pen (@MLP_officiel) October 12, 2020
Quand l’hommage à un héros qui a fait face au #terrorisme islamiste devient une insulte à sa mémoire. #Beltrame @Paris #Pathétique pic.twitter.com/Qrdxkt4SFR
— Jean-Charles Brisard (@JcBrisard) October 12, 2020
« Combattons l’héroïsme alors ! »
« Comment peut-on nier à ce point la barbarie et le terrorisme islamiste qui sont les seuls responsables de son assassinat ? S’il est mort en héros, il n’est en rien victime de son héroïsme », a réagi la présidente déléguée du groupe LREM à l’Assemblée nationale, Aurore Bergé. Le député LREM de l’Indre, François Jolivet, suggère pour sa part une correction de la phrase : « Victime du terrorisme islamiste ».
Wassim Nasr, journaliste de France 24 spécialiste du terrorisme, estime « qu’à force de ne pas vouloir nommer al-Qaeda et l’État islamique, on finit par se faire des nœuds dans la tête et dire n’importe quoi« . « ‘Victime de son héroïsme’ c’est aussi aberrant que ‘victime du terrorisme’ même avec l’adjectif package ‘islamiste’ ça reste un mode opératoire ! », ajoute-t-il.
« Victime de son héroïsme ? Combattons l’héroïsme alors ! Serait-il son propre bourreau ? Serait-ce un suicide ? Non ignares ! Arnaud Beltrame est une victime du terrorisme islamiste », s’exclame le journaliste et écrivain Mohamed Sifaoui sur Twitter.
Victime de son héroïsme ? Combattons l’héroïsme alors ! Serait-il son propre bourreau ? Serait-ce un suicide ?
Non ignares !
Arnaud Beltrame est une victime du terrorisme islamiste pic.twitter.com/IYrMe2sgE5— Mohamed Sifaoui (@Sifaoui) October 11, 2020
L’adjointe à la mairie de Paris en charge de la mémoire, Laurence Patrice, a reconnu qu’elle découvrait cette « formulation assez malheureuse ». Le maire de Paris centre, Ariel Weil, s’est également exprimé sur le sujet : « Je ne comprends pas cette construction stylistique. Je suis également ravi de ce jardin nommé en souvenir d’Arnaud Beltrame et étonné de cette formulation que nous reverrons (nous ne l’avons pas validée). »
Oui @ArielWeilT je découvre cette formulation qui est assez malheureuse, on devrait pouvoir changer cela effectivement !
— Laurence Patrice (@lau_patrice) October 11, 2020
Cédric Beltrame estime qu’une modification serait nécessaire
« La rédaction de la plaque avait été validée par la famille d’Arnaud Beltrame, et inaugurée en présence de sa mère et Anne Hidalgo », a précisé la mairie de Paris interrogée par Le Figaro. « C’est une évidence que la Ville ne décide pas par elle-même sans l’accord de la famille », ajoute-t-elle, indiquant qu’elle est prête à modifier la formulation faisant polémique.
Le frère d’Arnaud Beltrame, Cédric, a indiqué à nos confrères qu’il ne se souvenait pas avoir été sollicité et pense que sa mère « a découvert le libellé sur place ». « Ce serait mieux d’avoir «Mort en combattant le terrorisme islamique» ou «Victime du terrorisme islamique » a-t-il estimé.