Montpellier : 20 ans de prison pour avoir massacré son épouse après 54 ans de mariage

La victime âgée de 73 ans a été tuée d'une quarantaine de coups de pelle au visage, en août 2018. Quelques mois plus tôt, elle avait demandé le divorce. Son mari, âgé de 83 ans aujourd'hui, a écopé d'une peine de vingt ans de prison ce vendredi par la cour d'assises de l'Hérault.
Montpellier : 20 ans de prison pour avoir massacré son épouse après 54 ans de mariage
Le palais de Justice de Nice. (Illustration/photo David Franklin/shutterstock)
Par Actu17 avec AFP
Le vendredi 14 octobre 2022 à 22:25

Comment juger un homme de 83 ans presque sourd et sénile ? Quelle peine lui infliger pour avoir massacré son épouse depuis 54 ans, qui voulait divorcer ? La cour d'assises de l'Hérault a donné sa réponse vendredi en condamnant Abderrahmane Khalid à 20 ans de réclusion. Pendant les trois jours de son procès à Montpellier, où il encourait la perpétuité, l'ancien chauffeur-livreur, en détention provisoire depuis quatre ans, a semblé absent, le regard perdu.

N'entendant pas ou ne comprenant pas les questions de la présidente de la cour d'assises, de l'avocate générale ou des parties civiles, qui tâchaient de lui faire dire pourquoi il avait asséné une quarantaine de coups de pelle au visage de sa femme, Akila Cherrad, 73 ans, en août 2018, il a souvent répondu de travers.

"Monsieur Khalid, avez-vous quelque-chose à ajouter pour votre défense ?", a tenté une ultime fois la présidente vendredi après-midi. "Pour mes enfants ?", répond l'homme, avant de déclarer en quelques mots confus qu'il était "désolé de ce qui s'est passé". Les jurés ont reconnu que la responsabilité de l'accusé, âgé de 79 ans à l'époque des faits, était atténuée par ses troubles psychiques, selon le verdict prononcé après un délibéré de trois heures.

Le 2 août 2018, cet homme au casier judiciaire vierge "est entré de manière fracassante dans la criminalité", avait souligné l'avocate générale, Isabelle Delande, en réclamant une peine "d'au moins 15 ans" de prison.

Elle avait souligné "l'absence de remords" de M. Khalid, né en Algérie en 1939 et qui avait tout fait pour s'intégrer socialement en France, avec sa femme, épousée à Lyon en 1964 et dont il se disait "inséparable". Après une vie de travail à Grenoble, ils avaient réussi à s'offrir une belle maison dans l'Hérault. "Ce qui l'obsède, c'est la perte de sa maison, de ne pas passer sa retraite comme il l'avait imaginée", avait cinglé Mme Delande.

«La faire disparaître»

Akila Cherrad, femme au caractère bien trempé mais "malheureuse", a-t-elle ajouté, ne supportait pas d'être l'assistante de vie d'un mari défaillant, pour lequel elle avait l'impression de s'être sacrifiée toute sa vie.

S'il est vrai qu'elle dévalorisait souvent son mari, lui reprochant en des termes crus son illettrisme ou son impuissance, elle n'avait jamais fait preuve de violences envers son mari, a-t-elle insisté. De son côté, lui avait développé une forme de paranoïa, s'étant "auto-persuadé" que son épouse de 73 ans le trompait avec un amant, au sein même du domicile conjugal. "C'est la crainte qu'elle s'approprie tout ce qu'il avait construit" qui l'a fait basculer, selon la magistrate.

Quelques mois plus tôt, en avril 2018, Akila Cherrad avait introduit une requête en divorce. Puis, en juillet, mari et femme avaient déposé des plaintes croisées, lui accusant son épouse de vol de documents, elle lui reprochant des violences.

Interrogé sur ses cinquante ans de mariage, Abderrahmane Khalid, arrivé en France à l'âge de 16 ans, avait raconté une vie "normale", faite de "cadeaux aux anniversaires des filles", de "vacances au Sénégal et aux États-Unis", ou encore de "sorties à vélo avec Akila".

Selon l'enquêtrice de personnalité, il s'agissait d'une "vitrine parfaite" derrière laquelle régnait un "chaos interne" au sein du couple. Abderrahmane Khalid a maintenu qu'il avait agi sur un "coup de folie", disant ne pas se rappeler des détails. "Il savait ce qu'il faisait, il voulait la tuer, la faire disparaître, l'achever", a martelé vendredi l'avocate générale, en comparant le visage de sa femme, victime de "36 coups de pelle", à "une sculpture de César".

L'avocate de la défense, Florence Delfau-Bardy, avait demandé de la "retenue" aux jurés : "L'acte est sauvage, mais la personne qui l'a commis n'est pas un sauvage", avait-elle plaidé.