Mort d'Adama Traoré : une nouvelle expertise renforce l'hypothèse du «coup de chaleur»

Les experts belges n'ont pas apporté de modifications aux conclusions concernant le décès d'Adama Traoré en juillet 2016, évoquant un "coup de chaleur" qui n'aurait "probablement" pas été mortel sans son interpellation par les gendarmes.
Mort d'Adama Traoré : une nouvelle expertise renforce l'hypothèse du «coup de chaleur»
Assa Traoré accompagnée de plusieurs manifestants le 2 juin 2020 à Paris. (Javier Pina/shutterstock)
Par Actu17 avec AFP
Le jeudi 10 novembre 2022 à 00:57

Un nouveau complément d'expertise médicale rendu le 22 août confirme un précédent rapport selon lequel la mort d'Adama Traoré en 2016 a été causée par un "coup de chaleur" aggravé par la "contrainte" de trois gendarmes, d'après le document dévoilé par Libération consulté le mercredi 9 novembre par l'AFP.

Quatre experts belges avaient conclu en janvier 2021 que la mort de ce jeune homme noir, le 19 juillet 2016 dans la caserne de Persan (Val-d’Oise), avait été causée, en ce jour de canicule, par un "coup de chaleur" qui n’aurait toutefois "probablement" pas été mortel sans son interpellation par les gendarmes, qui avaient menotté le jeune homme alors qu’il se débattait allongé sur le ventre. Ils n’ont pas été mis en examen dans l’information judiciaire au long cours.

Ces experts ont été sollicités une nouvelle fois, en juin 2021, pour un complément d’expertise après le versement au dossier de nouveaux témoignages et d’éléments médicaux. Trois des quatre experts initiaux ainsi qu’un quatrième ont conclu le 22 août que "les nouvelles auditions et les documents médicaux établis par la médecine du travail ne modifient pas les conclusions du rapport d’expertise collégiale précédent".

«C’est comme si son corps ne réagissait pas»

Parmi ces nouvelles auditions, un témoin direct, qui connaissait Adama Traoré depuis l’enfance et l’avait aidé à s’échapper après sa première interpellation, dans la journée du 19 juillet 2016. Selon lui, "Adama était essoufflé. (…) Je n’ai pas l’habitude de le voir essoufflé, mais c’est vrai que là quand je suis intervenu, j’ai été un peu surpris de le voir fatigué".

"C’est comme si son corps ne réagissait pas. (…) Pour moi, il était dans un état qui n’est pas habituel, il ne parlait pas", a raconté ce témoin. Pour les quatre experts belges, ce témoignage "renforce l’hypothèse avancée par le collège précédent selon laquelle l’hypoxémie provoquée par le coup de chaleur à l’exercice évoluait depuis bien avant l’interpellation de Adama Traoré".

«Pas de responsabilité directe des gendarmes» selon l'un de leurs avocats

"Au moment de la seconde interpellation, l’hypoxémie était donc bien installée, entretenue" notamment par la sarcoïdose - une pathologie rare - dont souffrait Adama Traoré, d’après eux. Ces éléments "renforcent même (leur) conviction quant aux mécanismes physiopathologiques ayant mené au décès", ajoutent-ils. "Il n’y a pas de responsabilité directe des gendarmes car la cause principale du décès, c’est le coup de chaleur à l’exercice entretenu par la sarcoïdose", a commenté Me Rodolphe Bosselut, avocat de deux des trois gendarmes.

Pour Me Yassine Bouzrou, avocat de la famille du défunt, "sans l’interpellation violente des gendarmes, Adama Traoré ne serait pas mort. Autrement dit les gendarmes ont causé (sa) mort. La mise en examen et le renvoi devant une juridiction s’imposent en droit".