Le mardi 13 décembre 2022 à 18:28
Ancienne star des cryptomonnaies, Sam Bankman-Fried, l'ex-patron de la plateforme FTX, encourt désormais de lourdes sanctions pénales après son arrestation aux Bahamas et son inculpation par la justice américaine. Poursuivi entre autres pour fraude et blanchiment d'argent par le procureur fédéral de New York, M. Bankman-Fried est aussi sous le coup d'accusations de régulateurs américains et comparaît mardi devant un juge des Bahamas. Les États-Unis souhaitent qu'il soit extradé.
La chute est vertigineuse pour celui qui faisait figure, il y a quelques mois encore, de star du secteur, à la tête d'une entreprise valorisée 32 milliards de dollars en début d'année. La soudaine implosion de FTX en novembre a marqué le début de la dégringolade pour le jeune homme de 30 ans, reconnaissable à son abondante crinière et son style vestimentaire souvent décontracté.
Considérée comme l'une des principales plateformes d'échange de cryptomonnaies au monde, FTX n'a plus été en mesure au début du mois dernier de reverser à ses clients l'argent qu'ils y avaient déposé. Le groupe a annoncé son dépôt de bilan le 11 novembre et M. Bankman-Fried s'est vu contraint de quitter ses fonctions.
Soupçonné d'avoir joué un rôle majeur dans l'effondrement de FTX, celui qui se fait surnommer SBF continuait pourtant de s'exprimer abondamment dans les médias et sur les réseaux sociaux sans toujours avoir l'air de mesurer la gravité de la situation. Quelques heures avant son arrestation lundi, il a ainsi participé à une conversation audio sur Twitter, suscitant la stupéfaction de ses interlocuteurs lorsqu'il a avoué jouer simultanément à un jeu vidéo.
Ascension fulgurante
M. Bankman-Fried avait connu une ascension fulgurante. Après avoir créé la société d'investissement et de courtage en cryptomonnaies Alameda Research en 2017, il s'est installé à Hong Kong et y a cofondé FTX.
La plateforme s'est développée tout comme la fortune personnelle de SBF, estimée à 25 milliards de dollars par le magazine Forbes il y a quelques mois. Il affirme désormais avoir presque tout perdu. SBF a déplacé le siège de FTX aux Bahamas, où les impôts sont presque inexistants, en justifiant alors son choix par le fait qu'il s'agit de "l'un des rares pays à disposer d’un régime complet sur l'octroi de licences pour les cryptomonnaies".
Le succès de FTX a permis à la plateforme de nouer de prestigieux partenariats, notamment avec la légende du football américain Tom Brady et la top modèle brésilienne Gisele Bündchen. Le groupe a aussi fait jouer le comédien Larry David dans une publicité diffusée lors du Super Bowl, événement sportif le plus regardé aux États-Unis.
A l'aise face aux journalistes comme aux hommes politiques, M. Bankman-Fried a été auditionné à plusieurs reprises par des parlementaires américains, se faisant le chantre d'une meilleure régulation des actifs numériques. Il s'était aussi engagé à reverser la quasi-totalité de sa fortune à des causes qui lui sont chères comme le bien-être animal ou la lutte contre le réchauffement climatique.
Retraits massifs
Ce fils d’universitaires, diplômé en sciences physiques du prestigieux Massachusetts Institute of Technology (MIT) s'était fait plus récemment le chevalier blanc d'un secteur à la dérive, venant à la rescousse de plusieurs société en cryptomonnaies en difficulté. Mais il a brusquement vu son étoile pâlir quand un article de presse a révélé des relations douteuses entre FTX et Alameda et que Changpeng Zhao, le patron de la plateforme rivale Binance, a dans la foulée émis des doutes sur la solvabilité d'Alameda.
Face aux retraits massifs de ses clients et accusant un déficit de plusieurs milliards de dollars, FTX et une centaine d'entités liées se sont placées sous le régime américain des faillites. Des sommes conséquentes prêtées à Alameda seraient en réalité des placements des clients de FTX, qui ont vraisemblablement été perdus dans des investissements risqués.
Interrogé début décembre par le journaliste George Stephanopoulos de la chaîne ABC pour savoir s'il craignait une peine de prison, SBF avait botté en touche. "Il y a beaucoup de choses qui m'inquiètent en ce moment", avait rétorqué le jeune homme, l'air contrit. "J'essaie de me concentrer du mieux que je peux sur ce que je peux faire pour être utile et laisser les processus réglementaires et juridiques en cours se dérouler normalement."