Le jeudi 14 septembre 2023 à 15:46
Éric Dupond-Moretti, le ministre de la Justice, sera jugé par la Cour de justice de la République (CJR) du 6 au 17 novembre prochains, dans une affaire de "prise illégale d'intérêts", a annoncé ce jeudi le procureur général près la Cour de cassation dans un communiqué. C'est la première fois qu'un ministre en exercice comparaîtra devant cette juridiction.
Éric Dupond-Moretti est soupçonné d'avoir profité de sa position ministérielle pour régler des comptes avec des magistrats qu'il avait précédemment côtoyés en tant qu'avocat.
L'affaire se divise en deux volets principaux. En septembre 2020, le ministre a ordonné une enquête administrative contre trois magistrats du Parquet national financier (PNF). Ces magistrats auraient examiné les factures téléphoniques détaillées (fadettes) d'Éric Dupond-Moretti lorsqu'il était avocat, dans le cadre de l'affaire "Paul Bismuth", qui concernait des écoutes à l'encontre de l'ex-président de la République, Nicolas Sarkozy. Récemment, en octobre 2022, le Conseil supérieur de la magistrature (CSM) a estimé que ces magistrats n'avaient commis aucune faute disciplinaire en rapport avec l'affaire des "fadettes".
Le second volet concerne une enquête administrative lancée par Éric Dupond-Moretti contre Édouard Levrault, un ancien juge d'instruction à Monaco. Édouard Levrault avait précédemment mis en examen un client d'Éric Dupond-Moretti lorsqu'il était avocat. À l'époque, le ministre avait critiqué les méthodes du juge, les qualifiant de "cow-boy".
Le ministre nie les faits
Face à ces allégations, Éric Dupond-Moretti conteste fermement les faits. Il a précisé avoir uniquement suivi les "recommandations de son administration". Une information judiciaire avait été initialement ouverte en janvier 2021, aboutissant à sa mise en examen pour "prise illégale d'intérêt" en juillet 2021. Depuis, le garde des Sceaux a tenté à plusieurs reprises de contester la procédure, sans succès.
L'avocat du ministre, Me Patrice Spinosi, a déclaré que son client "attend avec confiance" le procès, espérant que ce dernier "mettra en lumière l'inexistence d'un quelconque conflit d'intérêts dans cette affaire".
La Cour de justice de la République a précédemment jugé onze anciens ministres en trente ans d'existence. Aucun d'eux n'a reçu de peine de prison ferme, et six ont été innocentés.