Le vendredi 3 juillet 2020 à 10:32
Le réseau EncroChat fournissait quelque 50 000 téléphones portables chiffrés en 2020 permettant de communiquer sur son réseau de manière discrète et sûre. C'est en tout cas ce que pensaient les « 90% à 100% » de ses clients qui ont un rapport avec le crime organisé. La plupart des possesseurs de ces téléphones se livraient à des actes criminels : assassinats, blanchiment d'argent, extorsion de fonds, enlèvements, trafics de drogue...
Les autorités judiciaires française et néerlandaise ont annoncé le démantèlement de ce vaste réseau, ce jeudi, au terme d'une enquête hors normes. Saisie en 2019 par la France, Eurojust - l'organisme de coopération judiciaire entre pays européens installé à La Haye, aux Pays-Bas - a permis aux autorités de porter ce coup très dur au crime organisé à l'échelle mondiale.
#Cybercrime🏆 1ère mondiale : les #gendarmes du #C3N "crackent" la technologie #EncroChat qui crypte les communications !
Et 90% des utilisateurs d'EncroChat... sont impliqués dans des réseaux criminels !
👉🏾De multiples filières de malfaiteurs sont démantelées à travers le monde. pic.twitter.com/rgPAUdYb8r— Gendarmerie nationale (@Gendarmerie) July 2, 2020
Plus de 100 millions de messages échangés entre criminels à travers le monde sur EncroChat ont été interceptés et déchiffrés en temps réel. Le 13 juin dernier, le réseau a identifié le piratage et lancé un message d'alerte à ses clients expliquant qu'il avait été « infiltré illégalement » par des « entités gouvernementales » et leur a alors conseillé de se débarrasser « immédiatement » de leurs téléphones, relate franceinfo.
Des discussions à bâtons rompus entre criminels
« On a utilisé le fait que les criminels font confiance aveuglément à la crypto-communication et parlent librement », a indiqué Andy Kraag, responsable de la division criminelle de la police néerlandaise. Les informations ainsi récupérées sont « une mine d’or nous fournissant des preuves qui nous auraient coûté des années en temps normal », a-t-il affirmé.
Ces téléphones avaient été repérés en France, dès 2017, par l'Institut de recherche criminelle de la Gendarmerie nationale (IRCGN) après leur découverte lors d'interpellations et de perquisitions contre le crime organisé. Depuis cette date, des gendarmes spécialisés dans la lutte contre la cybercriminalité tentaient de percer leurs secrets.
Les autorités françaises se sont refusées à communiquer sur les opérations en cours. De leur côté, les autorités néerlandaises assurent que l'infiltration d'EncroChat a permis d'empêcher la commission de « dizaines d'actes criminels violents », parmi lesquels des enlèvements, des meurtres et des fusillades.
Des faits de corruptions détectés
« Il est choquant de voir avec quelle facilité et sans le moindre scrupule ce type de graves actes criminels sont débattus et planifiés » sur EncroChat, ont-elles déploré, ajoutant que les données récupérées devraient être exploitées durant des années. Elles ont aussi permis de découvrir « des indices de fuite au niveau des services de police » et ont démontré « clairement le rôle de la corruption tout au long de la chaîne de trafic illicite ».
L'enquête a d'ores et déjà permis, rien qu'aux Pays-bas, l'interpellation de « plus de 100 suspects », la saisie de plus de 8 tonnes de cocaïne et d'1,2 tonne de méthamphétamine en cristaux, le démantèlement de « 19 laboratoires de drogues synthétiques », la saisie de « dizaines d'armes à feu automatiques », de « montres de luxe », de « 25 voitures, certaines comprenant des compartiments secrets » ainsi que de « près de 25 millions d'euros en liquide», précisent les autorités.