Le lundi 20 octobre 2025 à 22:58
Un vaste réseau criminel impliqué dans la manipulation de compétitions de tennis a été démantelé le 14 octobre 2025 grâce à une opération internationale coordonnée par Eurojust. Quatorze personnes ont été interpellées en France, en Bulgarie, en Espagne et en Roumanie. Elles sont soupçonnées d’avoir corrompu des joueurs classés au-delà de la 100e place ATP, en vue de truquer des matchs dans des tournois entre 2018 et 2024. Cinq suspects français ont été mis en examen à Marseille dans le cadre d’une information judiciaire ouverte en mai, a annoncé le parquet de Marseille.
L’affaire débute en décembre 2023, à la suite d’"anomalies relevées dans la prise de paris par l’Autorité Nationale des Jeux (ANJ) et la Française des Jeux concernant un match du tournoi de double de l’Open de tennis de Rodez", précise le parquet dans un communiqué ce lundi. L’enquête est alors confiée au Service central des courses et jeux (SCCJ), qui identifie rapidement d’autres joueurs français impliqués dans des compétitions similaires. Le recours à des comptes de monnaie électronique permet de remonter jusqu’à "un réseau de corrupteurs opérant principalement depuis la Bulgarie, avec l’aide de nombreux intermédiaires, en France comme à l’étranger".
Une coordination entre plusieurs pays
Une information judiciaire est ouverte en mai 2025 au sein de la Juridiction interrégionale spécialisée (JIRS) de Marseille. Elle vise des faits "d’escroqueries en bande organisée, corruption sportive, blanchiment et recel en bande organisée et participation à une association de malfaiteurs". L’enquête nécessite une coordination entre plusieurs pays, sous l’égide d’Eurojust. Interpol contribue à la coopération policière via sa task-force dédiée à la lutte contre la manipulation sportive.
Le réseau démantelé est suspecté d’avoir "rémunéré plusieurs joueurs, situés au-delà de la 100e place ATP, en contrepartie de la perte volontaire d’un set ou d’un match", et ce dans une quarantaine de tournois Challenger ou Future. Ces compétitions se sont tenues "entre 2018 et 2024, en France, dans d’autres pays européens (Allemagne, Bulgarie, Espagne, Italie, Portugal, Turquie), en Amérique du Nord ou centrale (Canada, États-Unis, Mexique) et en Afrique (Égypte et Tunisie)".
Neuf interpellations en France
Le 14 octobre 2025, les forces de l’ordre procèdent à des interpellations coordonnées dans quatre pays. En France, neuf personnes sont arrêtées, "en Île-de-France, à Toulouse, Nancy, dans la région lyonnaise et en Guadeloupe". L’opération mobilise "une trentaine de policiers dont 22 fonctionnaires du SCCJ".
À l’issue de leur garde à vue, cinq hommes de nationalité française, âgés de 23 à 29 ans, sont présentés à un juge d’instruction. Ils sont "mis en examen des chefs d’escroqueries en bande organisée, corruption sportive en qualité d’auteurs ou de complices et de participation à une association de malfaiteurs". Il leur est reproché d’avoir "participé à des manœuvres frauduleuses consistant notamment en une entente préalable en vue de manipuler le déroulement de manifestations sportives donnant lieu à paris", et en "la création et l’utilisation de comptes joueurs auprès d’opérateurs de jeux internationaux, notamment via l’intervention de 'mules'", pour placer des paris sur des résultats prédéterminés.
Ces manipulations ont permis d’obtenir "plus de 800 000 euros de gains identifiés à ce jour", dans un système où les faits ont été commis "en bande organisée". Les mis en examen ont été placés sous contrôle judiciaire, avec interdiction "d’entrer en contact et de se livrer à toute activité commerciale ou sociale en lien avec le tennis".
En Bulgarie, "un dispositif d’une centaine de policiers et des magistrats spécialisés" permet d’interpeller plusieurs ressortissants bulgares, visés par un mandat d’arrêt européen. Des intermédiaires présumés sont également entendus. En Espagne et en Roumanie, des individus roumains sont arrêtés dans le cadre de mandats d’arrêt européens.
Les investigations se poursuivent sous l’autorité de la JIRS de Marseille, notamment par "l’exploitation de l’ensemble des données numériques saisies au cours de l’opération".