Le Mans : Par peur d'être mis en cause, deux CRS agressés et frappés choisissent de ne pas répliquer

Deux policiers étaient hors service et passaient une soirée tranquille dans un bar du Mans (Sarthe) lorsqu'ils sont intervenus en voyant une altercation entre clients. Agressés et frappés, ils ont préféré ne pas réagir par peur de se retrouver mis en cause.
Le Mans : Par peur d'être mis en cause, deux CRS agressés et frappés choisissent de ne pas répliquer
Illustration. (Frederic Legrand - COMEO / shutterstock)
Par Actu17
Le dimanche 21 juin 2020 à 16:29 - MAJ dimanche 21 juin 2020 à 16:54

L'affaire est en lien avec la période difficile traversée par les forces de l'ordre actuellement. La police fait face à de très nombreuses critiques ces dernières semaines, suite à la mort de Georges Floyd à Minneapolis aux États-Unis. Par peur d'être mis en cause, deux policiers hors service ont préféré ne pas réagir aux coups de leurs agresseurs dans la nuit du jeudi 11 au vendredi 12 juin dernier, au Mans, raconte Le Parisien.

La soirée se passait normalement. Les deux policiers affectés à la CRS 10 du Mans venaient de fêter le départ de l'un de leurs collègues et ont décidé de se rendre dans un bar, situé près de la préfecture de la Sarthe.

L'heure de fermeture de l'établissement approchait lorsque les deux fonctionnaires ont constaté une altercation qui était en train de s'envenimer entre plusieurs clients, à l'extérieur.

Ils disent qu'ils sont policiers, la situation dégénère

L'un des policiers que nous appellerons Franck, a décidé de sortir pour tenter de calmer la situation et défendre les personnes prises à partie. Son collègue a choisi de le rejoindre pour ne pas le laisser seul a-t-il expliqué le lendemain dans son audition.

"Ensuite, c'est parti en vrille. Franck a fait étalage de notre qualité. Il a dit : Nous sommes de la police, calmez-vous. Cela n'a rien changé. Cela a même eu l'effet inverse", a-t-il déclaré aux enquêteurs.

Les deux CRS en civil se sont retrouvés face à deux femmes surexcitées dont une mineure, ainsi qu'un homme plus calme. Ils ont finalement convenu de revenir dans le bar. C'est à ce moment-là que Franck a été violemment attaqué par cet homme. Son collègue décrit "une pluie de coups" alors qu'il était "au sol, en position fœtus".

"Je n'ai pas souhaité la frapper car c'était une femme, noire qui plus est"

La victime est parvenue tant bien que mal à se relever. Elle a alors constaté qu'une de ses jambes était fracturée. Le fonctionnaire souffre en effet d'une double fracture tibia-péroné.

Son collègue a lui aussi été frappé par une femme, au visage. Ce dernier qui mesure 2 mètres et pèse 110 kg, a décidé de ne pas réagir. "Je n'ai pas souhaité la frapper car c'était une femme, noire qui plus est. Avec le contexte particulier du moment, je ne voulais surtout pas que l'on parle de violences policières", a-t-il déclaré lors de son audition, relate le quotidien francilien. Le fonctionnaire craignait d'être pointé du doigt et mis en cause.

45 jours d'ITT

Une version des faits qui a été confirmée par un témoin mais également par le parquet, qui a souligné que les trois interpellés ne présentaient "aucune trace". Conduit à l'hôpital, Franck s'est vu attribuer 45 jours d'Incapacité totale de travail (ITT).

Les trois suspects ont été placés en garde à vue puis mis en examen dans cette affaire. Deux ont été placés en détention provisoire, le troisième a été laissé libre sous contrôle judiciaire. En outre, une information judiciaire a été ouverte pour violences ayant entraîné une ITT supérieure à huit jours en réunion et en état d'ivresse manifeste sur personne dépositaire de l'autorité publique.

Le syndicat Alliance CRS interrogé par France Bleu évoque "un lynchage". "Ils se sont freinés pour ne pas être taxés de violence à leur tour", a ajouté l'organisation qui dénonce "une ambiance anti-flic actuellement répandue en France".