Le vendredi 3 septembre 2021 à 11:02 - MAJ vendredi 3 septembre 2021 à 12:12
Converti à l’Islam radicale, il était parti faire le djihad en Syrie avant de revenir deux mois plus tard. Agent en mission ou simple méprise, Abdelmalik G. a été en contact avec les terroristes francophones les plus sanguinaires. Cet homme de 38 ans a été condamné jeudi par le tribunal correctionnel de Paris à une peine de 9 ans de prison ferme. Il comparaissait depuis mercredi pour des faits d’association de malfaiteurs en lien avec une entreprise terroriste. En clair, la justice reproche à cet homme, à l’allure sportive et à la barbe fournie, d’être parti en Syrie pour faire le djihad entre le mois de novembre 2013 et janvier 2014.
Partisan d’un Islam rigoriste, cet habitant de Vénissieux s’est laissé convaincre par un vétéran du djihad qu’il devait donner sa vie lors d’une guerre sainte. Son mentor n’est autre que Farid Melouk : un terroriste et djihadiste des premières heures qui s’est rendu dans des camps d’entraînement en Afghanistan dans les années 80. C’est un proche du GIA algérien, qui a participé à l’attentat du RER à Saint-Michel en 1995. Ce dernier est en cheville avec un autre homme : Slimane Khalfaoui, vétéran de la guerre de Bosnie et impliqué dans la filière de Francfort (Allemagne) qui a mis en œuvre le projet d’attentat du marché de Strasbourg. Les deux hommes sont partis très tôt en Syrie pour diriger un camp d’entrainement où ils bénéficiaient de la considération de tous et de protections. Ils seraient toujours en vie et encore actifs dans cette partie du monde.
Un groupe de combattants avec Tyler Vilus, Abdelhamid Abaaoud et Mehdi Nemmouche
Abdelmalik G. intègre ensuite un groupe de combattants, constitué de Français et de Belges. Arrivé en Syrie via la Turquie, il passe un peu de temps dans une madrasas (école coranique). Puis il est pris en charge dans ce camp d’entraînement où il apprend à se servir d’un fusil Kalachnikov. « C’est une structure qui formait les bataillons terroristes », relate la procureure. Il intègre ensuite un groupe de combattants, constitué de Français et de Belges qui avaient la langue en commun. On y trouve Tyler Vilus, une figure du djihadisme francophone condamnée à 30 ans de réclusion criminelle en juillet 2020 à Paris, Abdelhamid Abaaoud, l'un des tueurs du 13-Novembre, mort à Saint-Denis lors de l'intervention du RAID, et Mehdi Nemmouche, l'auteur de l'attaque du musée juif de Belgique en 2014, condamné à la réclusion criminelle à perpétuité en 2019.
« On est sur le pire de ces groupes qui a commis des exactions atroces », ajoute la magistrate. En janvier, le Lyonnais qui a laissé sa femme et enfants dans le Rhône, rentre en France. Selon sa version, il ne voulait pas participer aux atrocités et n’aurait fait que garder des check-points. « Je suis partie faire le djihad, confirme-t-il. Je voulais faire tomber le régime de Bachar el-Hassad et mettre en place un état régi par la charia. Mais je me suis rendu compte que je n’étais pas à ma place. Je suis rentré avec mon passeport. Je n’ai commis aucun crime et je n’ai pas de sang sur les mains ».
Lorsqu’il rentre en France, il est entendu par les forces de l'ordre qui le laissent libre. Il n’est impliqué dans aucune affaire pendant quatre ans. La France subit une vague d’attentats meurtriers et les priorités changent. Ce n’est qu’en 2018 qu’il est interpellé et placé en garde à vue par les enquêteurs de la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI). Les policiers mettent la main sur de la littérature djihadiste dans sa bibliothèque et des supports numériques. Il est alors mis en examen avant d’être écroué.
"Il ne s’est pas repenti et n’a pas évolué positivement"
Le procureur a requis une peine de dix ans de prison contre cet homme en évoquant l’hypothèse qu’il puisse être revenu en France pour exécuter une mission. « Il ne s’est pas repenti et n’a pas évolué positivement, souligne-t-elle. Cet homme est toujours très radicalisé. Il est dangereux. Ceux qui sont partis en 2013 sont les pires, car ce sont les plus aguerris et avertis ».
L'avocat d’Abdelmalik a demandé au tribunal de faire preuve de mesure et d’équilibre. Me Blandine Weck rappelle que son client a été élevé par un père absent et alcoolique et qu’il s’est réfugié dans l’Islam radical pour y trouver un cadre. Elle estime « qu’il a été embrigadé par Farid Melouk, mais qu’il n’est finalement resté que deux mois en Syrie, c’est très court ». Me Weck rappelle que son client, qui a ses idées, caresse un projet de formation comme menuisier et souhaiterait revenir auprès de sa famille pour tourner cette page de sa vie.