L'assaut de Marignane, les frères Kouachi, Germanwings : l'ex-patron du GIGN Denis Favier revient sur ses opérations majeures

Le deuxième épisode d'Intérieur Crime donne la parole à Denis Favier, ancien patron du GIGN, qui livre un récit précis de plusieurs interventions marquantes et du fonctionnement des forces d'élite.
L'assaut de Marignane, les frères Kouachi, Germanwings : l'ex-patron du GIGN Denis Favier revient sur ses opérations majeures
Denis Favier est l'ancien patron du GIGN et de la gendarmer nationale. (capture écran Intérieur Crime / TF1)
Par Actu17
Le dimanche 23 novembre 2025 à 15:45

L'ancien commandant du GIGN et ex-directeur général de la gendarmerie nationale, Denis Favier, revient longuement sur plusieurs opérations majeures dans le deuxième épisode d'Intérieur Crime, diffusé ce samedi sur YouTube. Interrogé par Guillaume Farde, consultant police-justice pour TF1/LCI, il décrit sans détour les mécanismes tactiques, les arbitrages politiques et les moments critiques qui ont marqué sa carrière.

Dès les premières minutes, l'entretien revient sur l'assaut de Marignane (Bouches-du-Rhône) en décembre 1994. Denis Favier se souvient avoir appris le détournement alors qu'il était en famille : "J'apprends par la télévision et également par une visite de la brigade locale qui vient me dire : il faut remonter à Paris très vite parce que là on a un sujet qui vous concerne". Il situe alors le contexte, marqué par l'activité du GIA et les tensions franco-algériennes : "On a tous les ingrédients de la crise majeure".

Il détaille ensuite la manière dont quatre terroristes ont pris l'Airbus A300 à Alger : "Ils montent à bord avec des uniformes de policiers (…) et rapidement l'équipage se rend compte que la situation est anormale". La France s'empare alors de la crise. Après la mort d'un ressortissant français, Paris exige que l'avion rejoigne le territoire national : "Très clairement, la France ne peut pas rester immobile".

L'entretien met en lumière le choix tactique d'anticiper une arrivée en France : "On décide de se prépositionner sur un aéroport du sud de la France (…) Marseille pour Alger, ça représente quelque chose". Lorsque l'avion se pose à Marignane, les équipes du GIGN sont prêtes : "On a un temps d'avance, et c'est extrêmement précieux".

«Les otages libérés sont des mines de renseignements extrêmement précieuses»

Une grande partie de l'échange revient sur la négociation. Le GIGN doit obtenir des informations essentielles : "La composition du commando, l'armement, l'emplacement des passagers…"Les otages libérés sont immédiatement exploités : "Les otages libérés sont des mines de renseignements extrêmement précieuses". Une fausse conférence de presse permet notamment de dégager les sièges situés derrière le cockpit : "Les rangs immédiatement derrière le cockpit ont été libérés, ce qui est intéressant au plan tactique".

L'épisode le plus critique survient lorsque les terroristes tirent sur la tour de contrôle : "Ils tirent à la Kalachnikov. Ce n'est pas un tir d'intimidation, c'est un tir à tuer". Le GIGN déclenche alors l'assaut d'urgence : "Ils tirent, donc il y a réaction immédiate".

«Un assaut, c'est un choc. Il y a de la fumée, des grenades, des visées laser qui sillonnent la carlingue»

Denis Favier revient en détail sur les difficultés rencontrées. D'abord, la porte avant ne s'ouvre pas, bloquée par quelques centimètres : "Il y a une réaction individuelle qui consiste à reculer pour permettre à la porte de sortir de son logement". Puis l'engagement d'une unité très éprouvée : "Un assaut, c'est un choc. Il y a de la fumée, des grenades, des visées laser qui sillonnent la carlingue". Dix gendarmes sont blessés. L'un des moments décisifs est la sortie du copilote : "Le copilote qui quitte son poste libère le champ de tir pour les tireurs d'élite".

Il décrit aussi la relation avec le politique : "Le temps du politique n'est pas le temps de l'opérationnel". Et la nécessité de donner au ministre des réponses claires : "Aller vite, ça veut dire quoi quand on n'a pas tous les éléments ?"

L'interview revient aussi sur la réforme de 2007, qui voit l'intégration au GIGN de personnels issus de l'EPIGN (Escadron parachutiste d'intervention de la Gendarmerie nationale) et d'autres entités de la gendarmerie, tout en préservant les missions distinctes du GSPR, qui continue d'assurer la protection du président de la République. Cette réforme doit préparer la France aux prises d'otages de masse : "On s'est posé la question : si ça arrive en France, est-ce qu'on est capables ?"

Denis Favier raconte ensuite la libération du Ponant en 2008, opération menée conjointement avec les commandos marine : "J'y suis allé en parachute, c'était le moyen le plus rapide d'arriver".

L'intervention pour neutraliser les frères Kouachi

Une large séquence est consacrée aux attentats de janvier 2015. Il décrit la recherche des frères Kouachi : "On boucle une zone de huit kilomètres de diamètre (…) on rend cette zone étanche". Il détaille son déplacement à Dammartin-en-Goële : "Si le patron de la gendarmerie ne se déplace pas, c'est qu'il y a un sujet". Et le lien permanent avec l'Élysée : "Sur la carte, on montre concrètement les choses au président".

Il revient aussi sur le crash Germanwings : "C'est une crise majeure. L'avion est dans une zone totalement inaccessible."Les équipes montent un laboratoire ADN improvisé : "En quelques heures, on pouvait avoir des résultats très pertinents".

Enfin, l'entretien se conclut sur sa vie après la gendarmerie et les sollicitations politiques dont il a fait l'objet : "J'ai été sollicité très clairement… mais le moment n'est pas venu".

L'épisode complet d'Intérieur Crime est disponible sur YouTube.