Attentat à Conflans : l'assaillant avait un statut de réfugié, il a demandé à des élèves de lui désigner le professeur

Le procureur de la République antiterroriste Jean-François Ricard a donné les premiers éléments de l'enquête sur l'attentat de Conflans-Sainte-Honorine (Yvelines) commis ce vendredi après-midi.
Attentat à Conflans : l'assaillant avait un statut de réfugié, il a demandé à des élèves de lui désigner le professeur
Le collège du Bois d'Aulne à Conflans-Sainte-Honorine le samedi 17 octobre 2020. (photo Arnaud Dumontier/PhotoPQR/Le Parisien/Maxppp)
Par Actu17
Le samedi 17 octobre 2020 à 15:54 - MAJ samedi 17 octobre 2020 à 16:39

C'est lors d'une conférence de presse que Jean-François Ricard s'est exprimé ce samedi. L'assaillant était bien âgé de 18 ans. Né à Moscou, le 12 mars 2002, il était d'origine tchétchène. Il avait obtenu un titre de séjour le 4 mars dernier, valable 10 ans, et bénéficiait du statut de réfugié. Par ailleurs, le terroriste habitait à Évreux (Eure).

"Il était inconnu des services de renseignements. Sur le plan judiciaire, il n'a jamais été condamné. Il était toutefois connu pour des affaires de dégradation de biens publics et de violence en réunions. Au moment de ces faits, il était encore mineur", a précisé Jean-François Ricard.

"L'auteur des faits était présent devant le collège dans l'après-midi"

Le procureur antiterroriste a également donné des détails au sujet du déroulement des faits. "Vendredi, à 17h11, la police nationale a été sollicitée par la police municipale après la découverte d'un corps sur la voie publique. La police municipale désignait un homme portant une arme de poing comme auteur présumé des faits. La police nationale a identifié l'agresseur présumé à quelques centaines de mètres du corps découvert. L'agresseur a couru vers les forces de l'ordre en tirant à cinq reprises avec une arme de poing de type airsoft. Trois des policiers ont riposté, entraînant la chute de l'assaillant. Alors qu'il tentait de se relever et de donner des coups de couteau, il a été neutralisé par les forces de l'ordre. Son corps présente neuf impacts de balles", a expliqué le magistrat. L'agresseur était muni d'un couteau "de type poignard". De plus, le couteau qu'il a utilisé pour tuer sa victime, long de 35 cm, avait été abandonné "à une trentaine de mètres du lieu du crime".

Par ailleurs, "l'auteur des faits était présent devant le collège dans l'après-midi, il avait demandé à des élèves de lui désigner la future victime", a révélé Jean-François Ricard.

Le procureur a confirmé que le tweet de revendication, comportant une photo de la tête de la victime, avait bien été envoyé par l'assaillant. Dans le téléphone de ce dernier, les enquêteurs ont découvert le texte de revendication qui avait été écrit dans le bloc-note de l'appareil, en amont, à 12h17. La photo était horodatée à 16h57, au moment de l'attaque donc.

"Les deux hommes ont exigé de manière virulente le renvoi du professeur"

L'enseignant présentait "de multiples plaies à la tête, au membre supérieur, à l'abdomen. Il a été décapité". "S'agissant du contexte. Les premières investigations ont permis d'établir que début octobre, la victime avait, lors d'un enseignement moral et civique dispensé à une classe de 4ème, évoqué la liberté d'expression. Un débat avait ainsi été organisé autour des caricatures de Mahomet de Charlie Hebdo et de l'opportunité de leurs publications. Dès le 7 octobre au soir, le père d'une des élèves publiait sur son compte Facebook un récit des faits faisant état de la diffusion d'une photo du prophète nu et un appel à la mobilisation contre l'enseignant au vu de son exclusion", indique Jean-François Ricard.

« Le 8 octobre, en fin de matinée, le père de l'élève accompagné d'un second individu, se présentaient au collège et ont été reçus par la principale. Les deux hommes ont exigé de manière virulente le renvoi du professeur sous peine de mobilisations et manifestations. En soirée, le parent d'élève a publié une vidéo sur Facebook où il nommait le professeur et le nom du collège. Il incitait 'à dire stop' », ajoute le magistrat.

"L'individu s'est ensuite présenté au commissariat, accompagné de sa fille, pour déposer plainte pour diffusion d'images pornographiques. La jeune fille indiquait que l'enseignant avait demandé avant son exposé aux élèves musulmans de sortir", poursuit le procureur. Le 12 octobre, "lors de son audition, le professeur a rejeté énergiquement avoir demandé aux élèves musulmans de s'identifier et de sortir de la classe. En revanche, il précisait avoir pris soin, avant de montrer les dessins, de proposer à ses élèves de ne pas les regarder dans l'hypothèse où ils pourraient être heurtés. L'enseignant a alors à son tour déposé plainte contre le parent, auteur de la vidéo, du chef de diffamation publique", détaille le magistrat.

"La demi-sœur de cet homme avait rejoint l’État Islamique en 2014 en Syrie"

"Neuf personnes ont été interpellées et placée en garde à vue. Quatre sont issues de l'entourage direct de l'agresseur. Deux personnes se sont présentées spontanément au commissariat en indiquant avoir été en contact avec l'auteur peu avant les faits. Le père de l'élève plaignante est également placé en garde à vue. La demi-sœur de cet homme avait rejoint l’État Islamique en 2014 en Syrie. Les dernières personnes en garde à vue sont l'homme apparaissant sur les vidéos et ayant accompagné le plaignant lors du rendez-vous avec la principale ainsi sa compagne", précise le procureur antiterroriste.

L'accompagnateur visible dans les vidéos est Abdelhakim Sefraoui, fondateur du collectif pro-palestinien Cheikh Yassine et membre du "conseil des imams de France". Il est connu des services de police et des services de renseignement, sa compagne a aussi été interpellée.

Les investigations des enquêteurs de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) et de la Sous-direction antiterroriste (SDAT) se poursuivent "pour préciser l'emploi du temps de l'auteur dans les jours qui ont précédé le crime". "Elles ont également pour finalité d'en déterminer le déroulement exact et déterminer l'implication potentielle d'autres personnes, dont celles gardées à vue".