Le dimanche 29 septembre 2024 à 21:40
Une précédente victime de Taha Oualidat, principal suspect du meurtre de Philippine, a pris la parole dans une lettre adressée à l'AFP. Cette femme qui a subi un viol de la part du suspect à Taverny (Val-d'Oise) en septembre 2019, souhaitant conserver l'anonymat, a exprimé sa tristesse et ses interrogations face à "la récidive des crimes sexistes et sexuels", appelant à des mesures renforcées pour prévenir de tels drames. Elle demande notamment le "lancement d'une commission d'enquête" sur cette question de la récidive.
Dans son courrier, elle confie : "Je pense à Philippine et à sa famille, et je suis immensément triste. J'aimerais les réconforter, la réconforter, mais je ne fais face qu'au vide insupportable laissé par sa mort". C'est la première fois qu'elle s'exprime depuis la découverte du corps de Philippine, une étudiante de 19 ans retrouvée ensevelie dans le bois de Boulogne, dans le XVIe arrondissement de Paris, samedi 21 septembre 2024. Les investigations des enquêteurs de la brigade criminelle de la police judiciaire parisienne ont rapidement permis d'identifier Taha Oualidat, un Marocain de 22 ans en situation irrégulière, comme principal suspect. Déjà condamné en 2021 pour le viol de cette femme qui a décidé de s'exprimer aujourd'hui, il a été interpellé à Genève (Suisse) ce mardi 24 septembre.
La première victime de Taha Oualidat explique avoir tout fait pour éviter une récidive. "J'ai tout fait pour que ce qui m'est arrivé ne se répète pas [...] J'ai porté plainte [...], tenu bon au cours des deux ans d'enquête, d'instruction puis de procès, en me disant que ma démarche protègerait d'autres femmes", souligne-t-elle. Cependant, après avoir purgé sa peine, le suspect avait été libéré en juin 2024, "en fin de peine", comme l'a confirmé le parquet de Paris, avant d'être placé au centre de rétention administrative (CRA) de Metz (Moselle), comme révélé par Actu17. Après 75 jours passés en rétention, Taha Oualidat a été assigné à résidence le 3 septembre. Il en a profité pour s'enfuir. Quelques jours plus tard, Philippine a été tuée.
«Pourquoi le système pénitentiaire a-t-il failli à prévenir cette récidive ?»
Dans sa lettre, cette femme exprime son incompréhension face aux failles du système judiciaire et pénitentiaire : "Pourquoi le système pénitentiaire a-t-il failli à prévenir cette récidive ? Pourquoi n'a-t-on pas su arrêter cette escalade de la violence jusqu’au meurtre d'une jeune femme ?".
Le statut du suspect, sous le coup d'une obligation de quitter le territoire français (OQTF), a suscité de nombreuses réactions politiques. Bruno Retailleau, ministre de l'Intérieur, a insisté sur la nécessité de "faire évoluer notre arsenal juridique, pour protéger les Français". Cependant, la victime insiste sur l'importance de ne pas réduire le débat à ce seul angle : le "dysfonctionnement" de l'OQTF ne doit pas "oblitérer la question primordiale de la récidive", précise-t-elle. Elle interroge les autorités sur les moyens réellement mis en place pour prévenir la récidive en prison : "Quelles mesures de prévention de la récidive sont prévues et effectivement mises en place dans les centres de détention ? Quel est l'impact de la détention dans la réduction des risques de récidives ? Quels programmes d'accompagnement à la réinsertion sont prévus ?".
Elle s'interroge également sur la coopération internationale en matière de récidive pour les criminels expulsés : "Quand bien même cette OQTF aurait été respectée, quels dispositifs de coopération internationale existent pour prévenir la récidive de crimes sexistes et sexuels de criminels expulsés ? Notre fraternité, notre humanisme, ne peut pas s'arrêter aux portes de nos frontières".
Taha Oualidat va être extradé
Dans l'enquête sur le meurtre de Philippine, le parquet de Paris a annoncé mercredi qu'une information judiciaire avait été ouverte des chefs de "meurtre précédé, accompagné ou suivi d’un autre crime (en récidive légale), viol (en récidive légale), vol (en récidive légale) et escroquerie (en récidive légale)" visant Taha Oualidat, le meurtrier présumé. Le juge d'instruction en charge du dossier "a délivré un mandat d'arrêt à son encontre", précise la même source. Le suspect sera présenté à un juge d'instruction en vue de sa mise en examen, dès son arrivée en France depuis la Suisse. Une procédure d'extradition est en cours.