Le mardi 15 février 2022 à 13:13 - MAJ mardi 15 février 2022 à 17:28
Le petit bourg de Saint-Laurent-de-la-Salanque, dans les Pyrénées-Orientales, est sous le choc de l'incendie meurtrier qui a ravagé plusieurs immeubles, et les habitants restent suspendus au travail des pompiers qui ont extrait mardi un huitième corps du bâtiment le plus endommagé. A la mi-journée, les pompiers ont hissé un brancard sur une nacelle. Quelques minutes plus tard, il a été déposé au sol, couvert d'un linceul blanc, a constaté une journaliste de l'AFP.
Jusque-là, les pompiers étaient à la recherche d'une femme de 66 ans, la dernière personne portée disparue dans les décombres de cet incendie. Lundi, ils avaient extrait sept corps, dont un bébé de quelques mois et un enfant de deux ans. "Il y a un important risque d'effondrement, c'est une progression minutieuse", avait auparavant déclaré Fabien Vergez, commandant des pompiers. Il montrait un petit immeuble encore non exploré de deux étages, entièrement noirci par les flammes, précisant que "les planchers sont très instables".
Le drame, survenu dans la nuit de dimanche à lundi, a également fait quatre blessés, dont un grave : un homme qui a sauté d'un 2e étage en voulant échapper aux flammes. Il est hospitalisé à Montpellier. Vingt-huit autres habitants ont été évacués.
Aucune piste privilégiée
Les victimes ont été surprises dans leur sommeil lorsqu'un incendie et une explosion ont ravagé plusieurs commerces et appartements vers 01h30 dans la nuit de dimanche à lundi. Selon divers témoignages, le sinistre s'est déclaré au rez-de-chaussée, où se trouvaient une épicerie et un local de restauration rapide.
Une enquête pour "incendie volontaire ayant entraîné la mort" a été ouverte par le procureur de Perpignan, Jean-David Cavaillé. L'explosion a-t-elle déclenché l'incendie ou l'inverse ? "L'enquête le déterminera", a déclaré le magistrat à l'AFP mardi, soulignant que les enquêteurs explorent aussi bien la thèse accidentelle que criminelle. "On ne privilégie aucune piste", a-t-il indiqué. Plusieurs voisins interrogés par l'AFP ont déclaré connaître les parents des deux enfants, un jeune couple, qui aurait aussi péri dans l'incendie.
Les accès aux rues où se trouvent les bâtiments incendiés ont été fermés, et des bâches en plastique noir installées sur de hautes barrières. Des enquêteurs de l'Institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale (IRCGN, police scientifique) ont pris des photos et procédé à des marquages au sol. D'autres gendarmes interrogeaient les riverains sur ce qu'ils ont vu et entendu. "Nous travaillons en lien étroit avec les enquêteurs. Dès que nous avons la moindre suspicion de retrouver quelque chose, nous arrêtons notre progression et le (leur) signalons pour pouvoir figer les scènes", a expliqué le commandant des pompiers.
Bougies et roses blanches
Des habitants de ce bourg de 10 000 habitants, situé à une vingtaine de km de Perpignan, ont déposé des bougies et des roses blanches au pied des barrières métalliques. "Je n'aurais jamais pensé vendre des fleurs le jour de la Saint-Valentin pour une telle catastrophe. J'aurais préféré que ces roses soient destinées à un amoureux ou une amoureuse", a confié à l'AFP Sylvain Gourlin, 47 ans, fleuriste dont la boutique est à quelques mètres des immeubles ravagés par les flammes. "Le jeune couple et leurs enfants étaient mes clients", affirme ce commerçant, les larmes aux yeux.
Dans le café derrière la mairie, les habitués sont choqués. "Je connaissais un petit peu le couple et leurs enfants (...) je les croisais souvent au PMU. Ils étaient jeunes, ils tenaient un petit snack (dans un autre quartier, ndlr). C'est tellement malheureux", soupire Laurent Naya, 51 ans, employé d'un supermarché. Nombre des habitants évacués vers des salles municipales sont en état de choc. Une cellule de soutien psychologique a été mise à leur disposition.
"C'est affolant, on aurait dit la guerre", témoigne Tristan Gubert, employé de mairie de 31 ans, qui a vu un des immeubles "en flamme jusqu'au 2e étage". "On entendait des cris de détresse, des appels au secours (...) Le traumatisme est important", a-t-il ajouté.
Le préfet Etienne Stoskpof a souligné que "l'urgence est de trouver un hébergement, un logement pour ceux qui n'ont plus accès à leur domicile". Il a précisé qu'à la suite de cette "catastrophe", un comité de suivi va centraliser les besoins des victimes, afin qu'elles n'aient pas à "s'adresser à trois, quatre administrations différentes", et "apporter des solutions qui coïncident au mieux avec les attentes des habitants".