Le mardi 9 juin 2020 à 15:46 - MAJ mardi 9 juin 2020 à 15:57
Les déclarations et décisions de Christophe Castaner ce lundi après-midi ne sont pas passées inaperçues et ont provoqué un vent de grogne du côté des policiers.
S'exprimant suite aux manifestations contre le racisme et les "violences policières", le ministre de l'Intérieur a annoncé que la méthode de « prise par le cou, dite d’étranglement » ne sera plus enseignée aux forces de l'ordre et sera proscrite lors des interpellations. Il s'agit d'une technique employée pour immobiliser un individu violent ou qui refuse de se laisser interpeller, qui est régulièrement utilisée par les policiers et les gendarmes.
Christophe Castaner a également déclaré que "chaque soupçon avéré de racisme" par un membre des forces de l’ordre, entraînera une suspension. Lorsque, dans une enquête de l'IGPN (Inspection générale de la police nationale) pour des soupçons de geste ou de propos raciste, « on a considéré qu'il y avait assez d'éléments pour transmettre au juge pour poursuivre », a expliqué le ministre sur RMC/BFMTV ce mardi matin, « je pense qu'il faut une sanction administrative ». Et « la sanction administrative de prévention, c'est la suspension », a-t-il souligné.
La "ligne rouge a été franchie"
De nouvelles mesures qui passent mal du côté des policiers. La fin de la clef d'étranglement représente un handicap pour les forces de l'ordre explique Frédéric Lagache, délégué national du syndicat Alliance police nationale, cité par Le Figaro : "Dès lors qu'elle est faite dans un court instant, c'est la seule technique qui permette aux agents de maîtriser un individu dont le poids est supérieur". "On en sera réduit au combat de rue ou à l'utilisation du taser", ajoute-t-il.
L'organisation syndicale de gardiens de la paix et gradés explique dans un communiqué ce mardi que la "ligne rouge a été franchie". "Plus aucune prise de risque avec les individus qui blessent 18 policiers par jour", demande le syndicat à ses troupes. A côté est visible un modèle de procès-verbal destiné aux policiers, lorsqu'ils n'ont pas été en capacité d'interpeller un individu virulent et qu'ils l'ont donc laissé partir. Le syndicat réclame aussi "la dotation du pistolet à impulsion électrique pour tous les policiers" en compensation.
La ligne a été franchie !
Tolérance zéro ? nous sommes prêts :
👉🏻 Plus aucune prise de risque avec les individus qui blessent 18 policiers par jour.
👉🏻 Alliance demande en compensation la dotation du Pistolet à impulsion électrique pour tous les policiers ! pic.twitter.com/orrYSkGNM9— ALLIANCE PN (@alliancepolice) June 9, 2020
"Bienvenue dans un monde où la police ne peut plus travailler", s'exclame l'organisation dans un second communiqué, où il est noté que les courses-poursuite sont interdites, tout comme la possibilité d'interpeller un individu qui s'y oppose. Une réponse directe aux propos du ministre de l'Intérieur.
"Je demande simplement à Christophe Castaner, de nous donner un moyen de remplacement"
"Si quelqu'un refuse de se faire interpeller et si on n'a plus la clé d'étranglement, qu'est-ce qu'on fait ?", s'est interrogé le secrétaire général du syndicat Unité SGP Police FO, Yves Lefebvre. "On a pas d'autres moyens aujourd'hui, c'est une méthode qui est enseignée depuis des décennies dans la police nationale. (...) On est confronté de plus en plus souvent à des individus qui refusent de se soumettre à une interpellation", a rappelé le syndicaliste à franceinfo.
"Je demande simplement à Christophe Castaner, de nous donner un moyen de remplacement, ce qu'on a pas aujourd'hui. Un moyen aussi efficace pour préserver l'intégrité physique des policiers opérants, que pour celle des personnes interpellées", a réclamé Yves Lefebvre.
"Il y a les annonces politiques et le réalité du terrain. On dirait que l'on vit dans un monde de bisounours où tout le monde est gentil sauf les policiers qui sont méchants", a réagi pour sa part Philippe Capon, le secrétaire général de l'UNSA Police.
"Depuis trop longtemps les policiers sont de la chair à canon"
"La révolte policière est sur le point d'éclater comme elle n'a jamais éclaté en France depuis 2001. Les événements de 2016 sont de la rigolade par rapport aux différents retours que nous avons du terrain", a écrit le syndicat Alternative Police CFDT dans un communiqué ce lundi, qui dans le même temps fait part "du dégoût le plus profond des policiers", "sur tous les fronts depuis 2015".
"Depuis trop longtemps les policiers sont de la chair à canon que le politique est bien content d'envoyer au charbon", peut-on également lire.