Le mardi 28 juin 2022 à 15:03 - MAJ mardi 28 juin 2022 à 20:48
Au moins 51 détenus sont morts et 24 ont été blessés dans l'incendie qui s'est déclaré à l'intérieur d'une aile de la prison de Tulua, dans le sud-ouest de la Colombie, ont annoncé mardi les autorités qui avaient d'abord évoqué une tentative d'évasion.
"L'un des détenus a mis le feu à son matelas" à la suite d'une bagarre et les flammes se sont propagées, a expliqué en milieu de journée le ministre de la Justice Wilson Ruiz en annonçant un bilan actualisé des victimes. Parmi les blessés, six se trouvent dans une unité de soins intensifs à l'hôpital, a-t-il précisé.
Plus tôt dans la matinée, les autorités avaient évoqué une tentative d'évasion de cette prison de moyenne sécurité du département de Valle del Cauca, dont le chef-lieu est Cali.
Selon les premières déclarations à des radios locales du général Tito Castellanos, le directeur de l'administration pénitentiaire colombienne (Inpec), les prisonniers sont morts dans l'incendie qu'ils ont eux-mêmes provoqué vers 02h00 heure locale (07h00 GMT) afin d'éviter l'intervention des gardiens pour pouvoir tenter de s'évader.
"Quand ils ont mis le feu aux matelas, ils n'ont pas mesuré les conséquences de ce qui pouvait arriver", a-t-il dit en donnant un premier bilan de 49 morts et 30 blessés.
A la mi-journée, le bâtiment de plusieurs étages, était lourdement gardé par des policiers et des militaires. À midi, les corps n'avaient toujours pas été évacués de la prison. Des experts médico-légaux travaillent à l'identification des corps. Un policier a donné une première liste avec les noms des survivants aux proches qui patientaient nerveux et angoissés devant la prison dans l'attente de nouvelles.
Lorena, la compagne d'un prisonnier qui n'a pas souhaité divulguer son nom de famille, a déclaré qu'elle avait pu lui parler aux premières heures de la matinée. Selon ce témoignage auprès du quotidien El Tiempo, le détenu s'est plaint de "tirs de gaz". Lorena a ensuite mis en cause la version des autorités, estimant "illogique qu'enfermés dans un bâtiment, ils mettent le feu aux matelas en sachant qu'ils peuvent brûler".
«Faire la lumière»
L'incendie n'a touché que le pavillon numéro 8 de la prison qui abritait 180 détenus, sur les 1267 que compte ce complexe pénitentiaire surpeuplé (17% de prisonniers en plus de sa capacité), selon l'Inpec. Les flammes se sont propagées le long d'un couloir et ont enflammé les matelas d'autres cellules, selon le ministre de la Justice.
Six surveillants qui ont fait usage d'extincteurs pour maîtriser le sinistre et aider des dizaines de prisonniers à en réchapper ont été intoxiqués par les fumées. Sans leur action, "le bilan aurait été pire", a affirmé le général Castellanos.
Le président colombien sortant, le conservateur Ivan Duque, a affirmé avoir "donné des instructions pour faire avancer les recherches qui permettront de faire la lumière sur cette terrible situation". "Ma solidarité va aux familles des victimes", a-t-il déclaré sur Twitter.
Le président de gauche élu de la Colombie, Gustavo Petro, a adressé ses condoléances aux familles des détenus qui ont péri et a appelé l’État à "repenser complètement la politique pénitentiaire autour de (...) la dignité du détenu". "L’État colombien a considéré la prison comme un espace de vengeance et non de réhabilitation", a ajouté sur Twitter celui qui prendra ses fonctions le 7 août, rappelant la mort de 23 prisonniers en mars 2020 au cours d'une mutinerie dans une prison de Bogota.
Quelque 97 426 personnes sont actuellement privées de liberté en Colombie, soit une surpopulation carcérale totale de 20%, selon l'Inpec.