Crash du Rio-Paris : Début du procès pour Airbus et Air France à Paris

Le crash de cet Airbus A330 avait coûté la vie à 216 passagers et 12 membres d'équipage.
Crash du Rio-Paris : Début du procès pour Airbus et Air France à Paris
Photo diffusée le 8 juin 2009 par la marine brésilienne d'un morceau de l'A330 d'Air France Rio-Paris. (Brazilian Navy / AFP / Archives)
Par Actu17 avec AFP
Le lundi 10 octobre 2022 à 15:23

Le 1er juin 2009, le Rio-Paris s'abîmait dans l'Atlantique, emportant les vies de 228 personnes. Plus de treize ans après le crash, le procès d'Airbus et d'Air France pour homicides involontaires s'est ouvert lundi à Paris. L'audience s'est ouverte peu après 13h30 dans la vaste salle d'audience de bois clair du tribunal correctionnel de Paris, quasiment pleine, où les débats doivent se dérouler jusqu'au 8 décembre.

Sur les bancs blancs s'étaient assis une cinquantaine de proches de victimes, non loin de leurs avocats. Côté prévenus étaient présents le président exécutif d'Airbus Guillaume Faury et la directrice générale d'Air France Anne Rigail, entourés de leurs conseils.

Après avoir lu les infractions reprochées aux deux représentants des entreprises à la barre, les trois juges du tribunal ont lu un à un les noms des 228 victimes du crash, dans un épais silence.

Le vol AF447 reliant Rio de Janeiro à Paris s'est écrasé en pleine nuit, quelques heures après son décollage, entraînant la mort de ses 216 passagers et 12 membres d'équipage. Il s'agit de la catastrophe la plus meurtrière de l'histoire d'Air France. Les premiers débris de l'A330 et des corps ont été rapidement retrouvés mais l'épave et les boîtes noires n'ont été repêchées que deux ans plus tard à 3900 mètres de profondeur après cinq phases de recherches sous-marines.

«Combat judiciaire»

Les investigations ont montré que les pilotes, désorientés par le givrage des sondes de vitesse Pitot dans la zone météorologique instable du Pot au noir, n'ont pu rattraper le décrochage de l'appareil, qui a eu lieu en moins de cinq minutes.

Après une succession d'expertises hautement techniques, les juges d'instruction ont prononcé un non-lieu en 2019. Le parquet, les proches de victimes et les syndicats de pilotes ont fait appel et, en 2021, la chambre de l'instruction a tranché en sens inverse, ordonnant un procès pour les deux entreprises.

A l'issue d'un "combat judiciaire" et d'une instruction "chaotique", "nous attendons que ce procès soit bien le procès d'Airbus et d'Air France" et non "celui des pilotes", a déclaré à l'AFP Danièle Lamy, présidente de l'association de proches de victimes Entraide et Solidarité AF447. "Nous attendons un procès impartial, exemplaire, pour que cela ne se reproduise plus et que, par ce procès, les deux prévenus mettent la sécurité aérienne au centre de leurs préoccupations plutôt que seulement la rentabilité", a-t-elle ajouté.

Pour le syndicat des pilotes du groupe Air France (Spaf), il est "indispensable qu'un tribunal puisse entendre toutes les parties et se prononcer sur les différentes responsabilités au cours d'un procès public où l'importance de la sécurité des vols sera mise en relief dans l’intérêt de tous".

De son côté, Air France "continuera à démontrer qu'elle n'a pas commis de faute pénale à l'origine de l'accident et plaidera la relaxe", a notamment déclaré l'entreprise dans un communiqué. Airbus, qui n'a pas voulu s'exprimer avant le procès, conteste aussi toute faute pénale.

Défaillance des sondes

Dans l'A330 immatriculé F-GZCP se trouvaient des personnes de 33 nationalités différentes, dont 72 Français (61 passagers et 11 membres d'équipage). Selon deux associations de familles de victimes, 58 Brésiliens et 26 Allemands ont perdu la vie.

Au total, 476 proches de victimes se sont constitués parties civiles. Cinq demi-journées seront consacrées à ceux souhaitant témoigner. Mais les débats seront surtout très techniques : le tribunal devra déterminer si Airbus et Air France, qui encourent 225 000 euros d'amende, ont commis des fautes en lien certain avec l'accident.

Dans son arrêt de renvoi, la cour d'appel a estimé qu'il existait des charges suffisantes contre le constructeur pour avoir "sous-estimé la gravité des défaillances" des sondes Pitot "équipant l'aéronef A330, en ne prenant pas toutes les dispositions nécessaires pour informer d'urgence les équipages des sociétés exploitantes et contribuer à les former efficacement".

La compagnie a été renvoyée pour s'être abstenue "de mettre en œuvre une formation adaptée (et) l'information des équipages qui s'imposait" face au givrage des sondes permettant de mesurer la vitesse de l'avion, "ce qui a empêché les pilotes de réagir comme il le fallait".

Les pannes de sondes s'étaient multipliées dans les mois précédant l'accident. Après la catastrophe, le modèle concerné a été remplacé dans le monde entier, et une formation renforcée au décrochage a été introduite.