Le vendredi 24 janvier 2025 à 17:43
La cour d’assises de l’Hérault, à Montpellier, a condamné Sandrine Pissarra, ce vendredi 24 janvier, à la réclusion criminelle à perpétuité assortie d’une période de sûreté de vingt ans. La mère de famille de 54 ans a été reconnue coupable d’avoir affamé, torturé et privé de soins sa fille Amandine, âgée de 13 ans, décédée le 6 août 2020 à Montblanc (Hérault). Jean-Michel Cros, le beau-père de l’adolescente, a pour sa part été condamné à vingt ans de réclusion criminelle pour privations de soins ayant conduit à la mort de l’enfant.
Le corps d’Amandine, pesant seulement 28 kilos pour 1,55 mètre, avait été retrouvé dans un état décharné au domicile familial. Enfermée dans un débarras sans fenêtre, l’adolescente avait été privée de nourriture et de soins durant plusieurs mois avant sa mort. Le procureur général Jean-Marie Beney a décrit en détail le "système Pissarra", qualifié de "dictature familiale" instaurée par Sandrine Pissarra depuis plus de quinze ans. "Depuis toute petite, Amandine est victime de coups, de cris, d’insultes, et d’isolement", a-t-il précisé, évoquant également la pratique de la "torture blanche", marquée par une mise à l’isolement prolongée et des humiliations.
Selon le magistrat, les violences s’étaient intensifiées dans les mois précédant la mort de l’adolescente, culminant avec son enfermement et sa privation totale de nourriture. "Le bug, c’est la mort d’Amandine. Ce n’était pas prévu", a-t-il dénoncé, relatant comment l’accusée avait tenté de dissimuler l’état de la jeune fille avant l’arrivée des secours.
«Je reconnais tout»
Au cours du procès, Sandrine Pissarra a reconnu l’ensemble des faits qui lui étaient reprochés. Interrogée par le président de la cour, elle a déclaré : "Je reconnais tout". Lors de la diffusion d’un enregistrement audio datant de 2019, réalisé par une voisine, les jurés ont pu entendre les cris d’Amandine : "Aïe, aïe, arrête, pas ça, j’ai mal…". Pour la première fois depuis le début du procès, l’accusée s'est mise à pleurer. "C’est la première fois que je vous vois pleurer", a noté le magistrat.
Lors de sa dernière prise de parole avant les délibérations, Sandrine Pissarra a présenté ses excuses à ses enfants. "Je suis une mère monstrueuse", a-t-elle déclaré, ajoutant qu’elle n’avait "jamais voulu qu’Amandine meure".
Un «lâche collaborateur du système»
Le procureur général Jean-Marie Beney a décrit Jean-Michel Cros comme un "lâche collaborateur du système" mis en place par Sandrine Pissarra. Selon lui, l’ancien compagnon de la mère "consistait à ne rien voir, ne rien entendre, ne rien dire, les mains liées dans le dos et les pieds dans un bloc de béton qu’on a coulé soi-même". S’adressant aux jurés, il a déclaré : "Vous répondrez oui à la question concernant les privations de soins reprochées à M. Cros", les exhortant à reconnaître sa culpabilité sur ce point. Bien que le parquet ait requis une peine de 18 ans de réclusion, les jurés ont finalement prononcé une peine de 20 ans.
Les avocats de Sandrine Pissarra ont souligné l’échec des nombreux adultes ayant croisé la route d’Amandine sans intervenir pour la protéger. "Le système, on aurait pu le fragiliser, le faire tomber, avant qu’il ne prenne le plein pouvoir", a plaidé Me Louis Dolez. Son confrère Me Jean-Marc Darrigade a insisté sur la nécessité de prononcer une peine "juste, raisonnable" permettant à l’accusée de "revenir parmi les hommes" sans être "une vieille dame".
Malgré ces plaidoyers, la cour a suivi les réquisitions du parquet, condamnant Sandrine Pissarra à la peine maximale. Une justice que les proches d’Amandine, notamment ses frères et sœurs témoins de l’horreur, espéraient depuis plusieurs années.