Le jeudi 6 février 2025 à 18:57
Le tribunal administratif de Melun (Seine-et-Marne) a annulé ce jeudi l'obligation de quitter le territoire français (OQTF) visant Boualem Naman, connu sous le pseudonyme "Doualemn", ouvrant ainsi la voie à sa sortie du centre de rétention administrative (CRA), selon une source judiciaire, confirmant une information d'Europe 1.
Dans son jugement, le tribunal a ordonné à la préfecture de "réexaminer la situation de l’intéressé dans un délai de trois mois et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour durant le temps de ce réexamen". De son côté, le ministère de l’Intérieur a annoncé son intention de faire appel de cette décision, bien que celui-ci ne soit pas suspensif. Par ailleurs, la Commission départementale d’expulsion des étrangers (COMEX) se réunira le 19 février pour examiner son dossier en vue d’une éventuelle expulsion.
Âgé de 59 ans et résidant à Montpellier (Hérault), Boualem Naman avait été placé en garde à vue en janvier dernier après la diffusion sur TikTok d’une vidéo controversée. Dans cette vidéo, il tenait des propos visant un opposant au régime algérien. Une première traduction avait conduit les autorités françaises à qualifier ses propos d'"appel au meurtre", tandis que la version retenue par la justice faisait état d’une incitation à "attraper" l’individu ciblé et à lui infliger une "correction sévère". À l’issue de sa garde à vue, il avait été relâché avec une convocation pour son procès prévu le 24 février.
Face à ces faits, le ministère de l’Intérieur avait engagé une procédure d’expulsion d’urgence, et Boualem Naman avait été expulsé vers l’Algérie le 9 janvier. Toutefois, Alger avait immédiatement refusé son retour et l’avait renvoyé en France, provoquant une crise diplomatique entre les deux pays. Le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau avait alors dénoncé une volonté "d’humilier la France".
Le 29 janvier, le tribunal administratif de Paris avait suspendu cette expulsion, estimant que la procédure d’urgence employée par Beauvau n’était pas justifiée. Le tribunal avait néanmoins souligné que "les faits reprochés" à Boualem Naman constituaient "une menace grave à l’ordre public justifiant une expulsion", et avait refusé de suspendre le retrait de son titre de séjour. Dans la foulée de cette suspension, le préfet de l’Hérault avait pris des arrêtés obligeant "Doualemn" à "quitter le territoire français sans délai et lui interdisant de revenir en France pendant trois ans". Ce sont ces arrêtés qui viennent d’être annulés par le tribunal administratif de Melun, jugeant la mesure infondée.
Un «acharnement féroce et aveugle»
Les avocates de Boualem Naman, Mes Marie David-Bellouard et Julie Gonidec, ont réagi vivement à cette décision. "Doualem sort de rétention. Le tribunal administratif vient d’annuler les décisions d’obligations de quitter le territoire, fondement du placement en rétention de Doualem. Ces décisions prises le 29 janvier, quelques heures seulement après la suspension de la décision d’expulsion initiale, avaient pour unique objectif de le maintenir enfermé", ont-elles déclaré. Elles dénoncent un "acharnement féroce et aveugle, aujourd’hui sanctionné", et considèrent que "le ministère a joué son va-tout et a perdu".