Lycéens mis à genoux à Mantes-la-Jolie : non-lieu dans l’enquête sur les conditions d’interpellations

En décembre 2018, 151 lycéens avaient été interpellés à Mantes-la-Jolie (Yvelines) et contraints de s’agenouiller, mains sur la tête, lors d’une intervention de police filmée et largement diffusée sur les réseaux sociaux. Plus de six ans après les faits, la justice a prononcé un non-lieu.
Lycéens mis à genoux à Mantes-la-Jolie : non-lieu dans l’enquête sur les conditions d’interpellations
Près de 150 lycéens étaient restés agenouillés à Mantes-la-Jolie, à la suite de leur interpellation, le temps de l'intervention des policiers. (capture écran vidéo / DR)
Par Actu17
Le mardi 8 avril 2025 à 21:44

Un non-lieu a été prononcé dans l'enquête sur les interpellations de 151 lycéens à Mantes-la-Jolie (Yvelines) en décembre 2018, indique une source proche du dossier, confirmant une information de l'AFP.

Le 6 décembre 2018, dans un contexte de fortes tensions liées aux manifestations contre la réforme du baccalauréat, Parcoursup et le service national universel (SNU), les forces de l’ordre avaient procédé à l’interpellation de 151 jeunes, âgés de 12 à 21 ans, à proximité de plusieurs établissements scolaires de Mantes-la-Jolie. L'opération s'était déroulée après plusieurs journées de violences autour des lycées, notamment celui de Saint-Exupéry. Un policier avait filmé les adolescents agenouillés, mains sur la tête, certains menottés, dans une vidéo de 30 secondes rapidement devenue virale. On y entendait l’un des fonctionnaires déclarer : "Voilà une classe qui se tient sage".

La diffusion de ces images avait provoqué une vive émotion, jusqu’au sein du gouvernement. Jean-Michel Blanquer, alors ministre de l’Éducation nationale, s’était déclaré "choqué".

Des «circonstances exceptionnelles»

Dans son ordonnance rendue publique le 7 avril 2025, le juge d’instruction a estimé que les fonctionnaires intervenus ce jour-là faisaient face à des "circonstances exceptionnelles" du fait du nombre de personnes interpellées et du "déficit de matériel et de policiers". Le magistrat a conclu que "dans de telles circonstances, le maintien des personnes interpellées, à genoux puis assis, dans l’attente du transport (...) poursuivait un but légitime (...) et était nécessaire et proportionné".

L’inspection générale de la police nationale (IGPN) avait d'abord été saisie en février 2019. L’enquête administrative avait été classée sans suite en juillet de la même année. Les plaintes déposées ensuite par un premier lycéen, puis par six autres, avaient entraîné l’ouverture d’une information judiciaire pour atteinte arbitraire à la liberté individuelle et violence par dépositaire de l’autorité publique. Les investigations visaient également X pour "torture" ou "acte de barbarie" par une personne dépositaire de l’autorité publique.

Dans son ordonnance, le juge mentionne que quatre des plaignants présentaient un "retentissement (psychologique) modéré". L’un d’eux a souffert de "symptômes post-traumatiques" tels que "cauchemars, angoisses, troubles du sommeil".

Les accusations de violences n'ont pas été corroborées

Selon les éléments de l’enquête, les accusations de "violences aggravées" formulées par certains mineurs n'ont été "corroborées, ni par leurs déclarations ou les observations de leurs conseils, ni par les examens médicaux des médecins légistes, ni lors de leur présentation à un magistrat dans le cadre de la prolongation de leur garde à vue".

Les trois policiers concernés avaient été placés sous le statut de témoins assistés. Le dossier avait été transféré de Nanterre (Hauts-de-Seine) à Versailles après que la magistrate initialement chargée du dossier s’était déclarée incompétente.

À l’annonce du non-lieu, Me Louis Cailliez, avocat des policiers, a réagi auprès de l'AFP : "Mes clients sont évidemment soulagés que justice leur soit rendue, plus de 6 ans après les faits", dénonçant un "cas d’école de dénaturation médiatique".

De son côté, Me Arié Alimi, avocat des lycéens, a indiqué que ses clients feront appel. Il a également réagi, affirmant que "quand on ne fait pas les actes d’enquête nécessaires à la manifestation de la vérité, on aboutit évidemment à un non-lieu".