Refus d’obtempérer à Stains : deux policiers écopent de quatre ans avec sursis pour des tirs ayant grièvement blessé un couple

Deux policiers de la brigade anticriminalité (BAC) de Stains (Seine-Saint-Denis) ont été condamnés à quatre ans de prison avec sursis pour avoir grièvement blessé un automobiliste et sa passagère lors d’un refus d’obtempérer en 2021. Le tribunal a également prononcé leur interdiction définitive d’exercer dans la police nationale. L’avocat des policiers a annoncé qu’il allait faire appel de cette décision.
Refus d’obtempérer à Stains : deux policiers écopent de quatre ans avec sursis pour des tirs ayant grièvement blessé un couple
Illustration. (Shutterstock)
Par Actu17
Le vendredi 8 novembre 2024 à 00:17

Deux policiers de la brigade anticriminalité (BAC) de Stains (Seine-Saint-Denis) ont été condamnés ce jeudi par le tribunal correctionnel de Bobigny à quatre ans de prison avec sursis pour avoir grièvement blessé par balles un automobiliste et sa passagère lors d’une intervention pour un refus d’obtempérer en août 2021. Les fonctionnaires, âgés de 30 et 33 ans, ont également reçu une interdiction définitive d’exercer dans la police nationale et ne pourront porter d'armes pendant cinq ans.

Le tribunal a jugé que les policiers, qui ont tiré huit fois en 6,25 secondes, "ne pouvaient se prévaloir de l’article 435-1 du code de sécurité intérieure", en raison de leur tenue en civil sans insignes ou brassards apparents. "Par ailleurs, il n’y a pas non plus de légitime défense lorsque vous avez fait usage de vos armes", a précisé la présidente de la 14e chambre correctionnelle, Dominique Pittilloni, en dénonçant une "disproportion entre les tirs qui ont grièvement blessé les victimes et le comportement du conducteur".

Cette décision a suscité une vive réaction de l’avocat des policiers, Me Laurent-Franck Liénard, interrogé par l'AFP. "Il s’agit d’une décision que nous ne comprenons pas et dont nous interjetons appel immédiatement", a-t-il réagi. Lors du procès en octobre dernier, la procureure avait requis un an de prison sous surveillance électronique à l'encontre des deux policiers.

Les deux victimes, Nordine, le conducteur, et Merryl, sa passagère, ont été gravement blessées. Nordine, touché par cinq balles, a souffert de blessures à l’abdomen, aux bras, à l’aine, à l’artère fémorale et au thorax, avec une incapacité totale de travail (ITT) de 127 jours. Il garde des séquelles physiques, notamment une perte de dix centimètres à un bras et des éclats de balle encore présents dans son corps. Merryl, quant à elle, a été traversée par une balle, a subi une ablation de la rate et a eu 100 jours d’ITT.

«Justice a enfin été rendue pour Nordine»

L’avocate de Merryl, Me Marine Allali, a souligné que sa cliente était "satisfaite que la culpabilité ait été retenue" et a estimé que "l’interdiction d’exercice du métier d’agent de police est adaptée aux faits", ajoutant que cette décision est "inédite". Pour Me Margot Pugliese, avocate de Nordine, "pour l’avenir, sur la manière dont les policiers ont le droit d’user de leurs armes, c’est important que le tribunal ait adopté une vision purement légaliste de l’article 435-1". Son second avocat, Me Vincent Brengarth, estime que "Justice a enfin été rendue pour Nordine", qualifiant cette décision de "significative" pour son client "mais également pour toutes les victimes de faits comparables", affirmant qu’elle "restitue la réalité des faits, en même temps qu’elle affirme enfin un signe d’indépendance de la justice, lorsque des fonctionnaires fautifs sont mis en cause".

Les faits s’étaient produits dans la nuit du 15 au 16 août 2021. Une vidéo amateur largement diffusée sur les réseaux sociaux montre une partie de l'intervention, où l’on voit l’un des policiers tenter d’entrer dans l’habitacle du véhicule tandis que le conducteur, alcoolisé, enclenche la marche arrière, puis repart en marche avant, entraînant l'un des policiers accrochés à la voiture. Les deux fonctionnaires ont alors ouvert le feu à plusieurs reprises, affirmant durant le procès avoir estimé que leur vie était en danger.