Le vendredi 28 janvier 2022 à 17:38 - MAJ mardi 8 février 2022 à 21:56
New York a rendu un hommage impressionnant vendredi à l'un des deux jeunes policiers tués il y a une semaine dans un échange de coups de feu à Harlem, symbole de la hausse de la criminalité dans la mégapole que son nouveau maire Eric Adams veut juguler par une politique plus répressive.
Des milliers de personnes, dont une immense majorité de policiers en tenue bleue ou noire, se sont massées pendant des heures devant et aux abords de la cathédrale Saint-Patrick sur la 5ème avenue de Manhattan, sous un ciel gris et lugubre et une bruine glaciale et neigeuse. A la fin d'une messe en l'honneur de l'agent Jason Rivera, mort à 22 ans, une foule immense le long d'une vingtaine de pâtés de maison du centre de Manhattan - cœur battant historique de New York - a salué dans un silence total le convoi funéraire du disparu, encadré par sa famille et des policiers à pied et à moto.
"Votre frère était un héros", a lancé dans une ambiance lourde le maire Eric Adams ancien capitaine afro-américain de la police de New York (NYPD) à des centaines de responsables et de proches de Jason Rivera, très émus, lors de l'office religieux. "Nous sommes des New-yorkais. Je crois en cette ville de tout mon cœur", s'est écrié l'édile natif d'un quartier défavorisé de la métropole.
The quietest you will ever hear New York City as Officer Jason Rivera’s coffin is loaded into the hearse pic.twitter.com/eNo0p7ocEA
— Steve Burns (@StvBurns) January 28, 2022
La jeune veuve du policier, Dominique, tout juste mariée, la voix nouée par la "douleur et la peine", a répondu : "C'est exactement comme cela qu'il aurait aimé qu'on se souvienne de lui: en vrai héros".
"Coup terrible au NYPD"
A l'extérieur, une policière anonyme a dit aussi à l'AFP sa "souffrance" pour son "ami" disparu. Un autre agent y a vu un "coup terrible" porté au NYPD "dans la période la plus difficile en 20 ans de carrière".
Jason Rivera a été tué le 21 janvier par les tirs d'un homme violent de 47 ans dans un immeuble de Harlem, après que sa mère eut appelé à l'aide la police. Le tireur est mort de ses blessures lundi et le second policier qui était intervenu, Wilbert Mora, 27 ans, est décédé mardi. La mort de ces deux agents a mis la pression sur le maire Eric Adams. Depuis qu'il est entré en fonction le 1er janvier, cinq policiers ont été touchés par des tirs d'arme à feu dans la mégapole de près de neuf millions d'habitants, a rappelé cet élu de l'aile droite du parti démocrate, qui a promis de lutter contre l'insécurité.
Eric Adams s'est engagé à plus de répression contre la prolifération des armes à feu, notamment illégales: il a annoncé lundi le rétablissement de patrouilles de policiers en civil, des "unités anticriminalité" rebaptisées "unités anti-armes à feu" qui avaient été supprimées en 2020 par l'ancien maire Bill de Blasio, après la mort de l'Afro-Américain George Floyd tué par un policier à Minneapolis.
The murders of Officers Jason Rivera & Wilbert Mora leave us with broken hearts, flags at half-staff, and black bands on our shields. They were great officers doing an important job — work their fellow Finest continue in their honor. Pray for them. Support them. And #NeverForget. pic.twitter.com/HCCMFDhiIo
— Commissioner Sewell (@NYPDPC) January 26, 2022
Ces agents étaient redoutés, quand Michael Bloomberg était maire (2002-2013), pour leurs fouilles controversées de jeunes Noirs et Hispaniques soupçonnés de porter des armes. Soutenant cette mesure "anti-armes à feu" et tout juste nommée par M. Adams, la cheffe du NYPD, Keechant Sewell, a promis de ne "jamais abandonner la ville" et de "toujours l'emporter" sur la criminalité.
"Système en échec"
Mais juste après la cérémonie, le maire s'est insurgé dans un communiqué contre la libération sous caution d'un "récidiviste" qui avait tiré sur des policiers dans le Bronx, "une preuve de plus que notre système est en échec" en allusion au laxisme supposé que la police reproche à la justice à New York.
Outre les attaques contre des policiers, des meurtres ont créé un vif émoi en ce début d'année. Le 14 janvier, à Harlem, une caissière portoricaine de 19 ans a été abattue par un braqueur dans un fast-food. Le lendemain, une femme d'origine asiatique de 40 ans était tuée par un sans-abri atteint de troubles psychiatriques qui l'a poussée sur une voie de métro au moment de l'entrée d'un train à la station Times Square.
La violence par arme à feu à New York - sans commune mesure avec ce qu'elle était il y a 30 ans - a légèrement progressé en 2021 (+4,3% par rapport à 2020, elle-même en hausse sur 2019) notamment en raison de la pandémie de Covid-19.
Signe que la ligne de fermeté de M. Adams engrange des soutiens politiques, le président Joe Biden est attendu le 3 février à New York pour parler de sa stratégie "pour lutter contre la violence par arme à feu" dans tout le pays, selon la Maison Blanche. Dans une autre grande ville américaine, Houston, trois policiers ont été blessés par balle lors d'une intervention jeudi.