Le jeudi 18 janvier 2024 à 20:36 - MAJ jeudi 18 janvier 2024 à 20:55
"Les JO, ce sera sans nous !", ont scandé les policiers à Paris, ce jeudi. La colère monte dans les rangs de la police nationale à six mois du début des Jeux olympiques. Plusieurs centaines de policiers étaient rassemblés sur l'avenue Victoria, face à l’Hôtel de ville de Paris, à la mi-journée pour ce "jeudi noir", à l'appel du "bloc syndical" composé de treize organisations, notamment Alliance Police Nationale et l'UNSA Police.
Les syndicats protestent contre "le flou" et le manque de la clarification face aux mesures qui vont être prises concernant l'organisation des forces de l'ordre, durant cet événement majeur. Ils réclament également des mesures spéciales, notamment des garanties sur les droits aux congés d’été et un accompagnement social, ainsi qu'une prime spécifique face aux nombreuses heures supplémentaires qu'ils vont effectuer.
"Le collègue [le policier] aujourd'hui ne sait pas à quelle sauce il va être mangé pendant les Jeux olympiques", a déploré Fabien Vanhemelryck, secrétaire général d'Alliance Police Nationale, aux journalistes, sur l'avenue Victoria. "On a eu sept ans pour préparer les Jeux olympiques, on est à trois mois de l'arrivée de la flamme, à six mois du début des JO, et aujourd'hui, le collègue ne sait même pas dans quel cycle horaire [de travail] il sera. Il ne sait même pas comment il va pouvoir faire garder ses enfants avec des vacations de 12 heures, sur cinq jours d'affilée, avec 60 à 70 heures par semaine de travail. Evidemment les heures supplémentaires, c'est normal qu'elle soit payée quand vous les faites : aujourd'hui, pour l'instant, elles ne sont pas payées. On nous parle d'une prime pour les Jeux olympiques de 500 voire 1500 euros, mais si je fais le ratio avec le nombre d'heures effectuées, on est même pas à la moitié du SMIC", poursuit Fabien Vanhemelryck, qui dénonce "un manque de respect et de considération" envers les policiers.
Une prime de 2000€ minimum réclamée
"Gouverner c'est prévoir, il n'y a eu aucune anticipation du gouvernement par rapport à la gestion des forces de l'ordre" pour ces Jeux olympiques, poursuit Eric Henry, délégué national du syndicat Alliance Police Nationale, à Actu17. "Cette gestion des forces de l'ordre, elle n'est pas du tout olympique. A ce jour, nous n'avons aucune réponse à nos questions depuis que nous avons écrit le 27 septembre dernier au ministre de l'Intérieur et depuis le vote à l'unanimité de notre motion JO, lors de notre congrès de Perpignan, le 10 novembre dernier".
Eric Henry insiste : "Les policiers sont sursollicités, surexposés. L'empilement des missions depuis plusieurs années est une réalité épuisante pour nos collègues. En 2023, les policiers ont été confrontés aux émeutes, aux risques terroristes, aux manifestations pour la réforme des retraites, à la coupe du monde de Rugby... Malgré tout ça, à ce jour, on ne sait pas où on va, on ne sait pas ce qu'on va devenir. Les collègues ne savent pas où ils vont travailler, dans quelles conditions, avec quelle logistique, quelle organisation". Concernant la prime attribuée aux policiers, le délégué national d'Alliance réclame "2000 euros minimum, pour tous les personnels actifs, administratifs, techniques ou scientifiques, engagés ou pas sur les JO", car "il ne faut pas oublier que les policiers qui ne seront pas engagés, devront effectuer toutes les missions du quotidien, seuls. La criminalité et le risque terroriste ne vont pas s'arrêter le jour de la cérémonie des JO".
«Si nous n’obtenons pas de réponses, d’autres actions syndicales seront organisées»
Même son de cloche du côté du syndicat UNSA Police. "Aujourd’hui, cette mobilisation conséquente des policiers a pour but de faire réagir l’administration", souligne Thierry Clair, secrétaire général adjoint de l'organisation syndicale, à Actu17. "Il y a maintenant sept ans que nous sommes au courant que les Jeux olympiques de 2024 seront à Paris ! À six mois de l’évènement, les policiers sont toujours et encore sans réponses à leurs inquiétudes légitimes. Quid de l’engagement ? De la garde d’enfant ? Des compensations ? De l’hébergement ? Si nous n’obtenons pas de réponses, d’autres actions syndicales seront organisées. Les policiers veulent être considérés et rétribués à la hauteur de leur engagement".
D'autres rassemblements ont eu lieu en France ce jeudi, notamment à Strasbourg, à Bordeaux, à Lyon, à Rennes, à Nantes, à Saint-Nazaire, mais également à l'aéroport de Roissy Charles-de-Gaulle. Les "nuiteux" se sont également regroupés, la nuit dernière, durant leur service, devant de nombreux commissariats. Le "bloc syndical" avait appelé les policiers à un "service minimum", c'est à dire, à ne sortir que sur appel d'urgence et ne pas prendre d'initiative, pour effectuer des contrôles par exemple.
Une enveloppe de 500 millions d'euros ?
Du côté du ministère de l'Intérieur, une enveloppe de 500 millions d'euros pourrait être mise sur la table pour faire face aux demandes des syndicats de police, selon plusieurs sources. Une somme qui serait consacrée à financer des séjours subventionnés pour les enfants de policiers, dans les crèches, les colonies de vacances ou les centres de loisirs. Les policiers vivant seuls ou les couples de policiers sont particulièrement concernés par ces mesures, et sont nombreux.
Concernant la prime JO annoncée juste avant Noël par le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, qui l'a obtenue auprès de la Première ministre de l'époque, Elisabeth Borne, les discussions devraient se poursuivre. "D'une valeur de 500 euros, elle pourrait être portée à 1000 euros, voire 1500 euros si l'engagement est particulièrement exceptionnel", avait précisé le ministre de l'Intérieur dans son courrier du 22 décembre. Un montant qui ne satisfait pas les syndicats de policiers. La question de la "mobilisation à 100%" des forces de l'ordre, réclamée par Gérald Darmanin, durant les Jeux olympiques qui se dérouleront du 26 juillet au 11 août prochain, est également l'un des points centraux qui cristallise les tensions.