Le lundi 16 mars 2020 à 19:08
Interrogé sur l'évolution de l'épidémie du coronavirus en France et sur la situation dans les hôpitaux jugée catastrophique par nombre de ses collègues, Jérôme Marty ne mâche pas ses mots et évoque une situation désastreuse pour le personnel soignant, dénonçant de graves dysfonctionnements notamment pour les médecins libéraux.
"On a un temps de retard depuis le début. On a, en gros, quinze jours de retard. Et ces quinze jours on ne les rattrapera pas", s'exclame-t-il. "Et nos confrères qui sont à Strasbourg, qui sont dans l'Est, qui sont à Mulhouse, aujourd'hui, vivent une situation extrêmement difficile. Et quand je dis "extrêmement difficile", je dis par là qu'ils donnent tout".
"Et toute la question c'est de se demander combien de temps on peut durer quand on donne tout. Actuellement on est totalement démunis, il faut quand même le dire ! Il faut qu'il y en ait un qui se lève et qui le dise !", poursuit-il.
"On n'a pas de masque, on n'a pas de moyen de protection. On n'a rien."
Jérôme Marty dénonce ensuite le manque de moyens qui ne permet pas aux médecins de travailler sans risque d'être contaminé : "On n'a pas de masque, on n'a pas de moyen de protection. On n'a rien. On veut même pas tester les soignants libéraux ! Quand un soignant libéral qui a les symptômes de la maladie demande à être testé, l'ARS [Agence régionale de santé] le refuse !"
"Mais à quoi ils jouent ces gens ? Ils ne nous donnent pas de masque et ils ne veulent même pas que l'on soit testé ? Ils veulent qu'un médecin contamine des patients, c'est ça qu'ils veulent vraiment ? Est-ce qu'ils imaginent que le rôle d'un médecin c'est de contaminer des patients ?", insiste le médecin.
"La vague on va la prendre dans la gueule dans une semaine à peu près. On joue avec nos vies là !"
"Le rôle d'un médecin c'est de soigner des patients. Actuellement vous savez ce qu'on fait ? On fait comme le sous-officier de la coloniale : on se démerde ! C'est à dire qu'on est en train, nous-mêmes, de trouver des protocoles, des choses pour se débrouiller parce qu'on est en manque", continue Jérôme Marty avant d'alerter une nouvelle fois : "On est en manque de tenues, on est en manque de tests, on est en manque de tout (...) La vague on va la prendre dans la gueule dans une semaine à peu près. On joue avec nos vies là ! On joue avec la vie des soignants."
"Ça va être véritablement une hécatombe de personnes âgées"
"En Soins de Suite et de Réadaptation (SSR), qui sont les établissements où il y a les patients les plus à risque : âgés, polypathologiques, il n'ont plus les moyens de se protéger. Les soignants ne peuvent pas se protéger, ça veut dire que si jamais un patient a la maladie, automatiquement un soignant va l'attraper et ça va se transmettre de chambre en chambre", décrit le praticien.
"Ça va être véritablement une hécatombe de personnes âgées. Est-ce que c'est ça qu'on veut ? Où sont les masques ? Il y a un mois, je dénonçais ça aux Grandes Gueules [l'émission sur RMC, ndlr]. Un mois plus tard, trente jours plus tard, on a le même problème", conclut Jérôme Marty, catastrophé.