Le vendredi 1 septembre 2023 à 12:24 - MAJ vendredi 1 septembre 2023 à 17:27
La demande de remise en liberté du policier de la brigade anticriminalité (BAC), mis en examen et placé en détention provisoire dans l'enquête sur la violente agression du jeune Hedi, à Marseille, a été acceptée ce vendredi, a appris Actu17 de source judiciaire.
Le fonctionnaire de 35 ans va être remis en liberté sous contrôle judiciaire dans la journée. Dans un communiqué, le parquet de Marseille précise que le policier a, dans le cadre de son contrôle judiciaire, l'interdiction d'exercer son métier de policier, l'interdiction d'entrer en contact avec la victime ainsi qu'avec les "coauteurs ou complices", ainsi qu'avec les "membres du groupe intervenant le soir des faits".
«Il a estimé avoir fait son devoir dans l'exercice de ses fonctions»
"Mon client a fait confiance à la justice, il s'est expliqué sur les faits qui lui étaient reprochés", réagit l'avocat du policier, Me Pierre Gassend, à Actu17. "Christophe a pu s'expliquer sur les circonstances du tir de lanceur de balle de défense (LBD), en démontrant qu'il en avait fait usage sur le jeune Hedi qui lançait possiblement un projectile, pour protéger l'intégrité physique de ses collègues. Il a estimé avoir fait son devoir dans l'exercice de ses fonctions, dans un contexte de violences urbaines et d'un climat insurrectionnel. Il a fait preuve d'un grand professionnalisme".
"La suite des investigations devra déterminer si ce tir de LBD a pu, ou pas, être à l'origine de certaines des lésions de Hedi, ce dont nous ne sommes pas sûrs", souligne Me Pierre Gassend. "Christophe a pu s'expliquer sur les faits et la confiance a été rétablie avec les juges, qui ont mis fin à sa détention, considérant qu'il avait coopéré dans le but d'atteindre la manifestation de la vérité. Il reste présumé innocent", poursuit l'avocat, qui tient "à saluer le professionnalisme ainsi que le travail exceptionnel et très difficile des forces de l'ordre" durant cette vague d'émeutes qui a touché le pays.
"Cette remise en liberté n'est pas étonnante compte tenu du fait que, dans sa décision du 4 août, la chambre de l'instruction lui tendait la perche", réagit ce vendredi en fin d'après-midi, Me Jacques-Antoine Preziosi, l'avocat de Hedi. "La cour disait qu'il y avait un risque de concertation, au moins jusqu'à la prochaine audition avec le juge d'instruction. Cette notion de "risque de concertation" représente une ambiguïté : quand les personnes concernées habitent la même ville, font le même métier et partent en vacances ensemble, comment voulez vous empêcher qu'elles se concertent ? Tout le monde a un téléphone portable", affirme Me Jacques-Antoine Preziosi.
"Si encore ces gens [les policiers en cause] ne s'étaient jamais concertés. Mais ils s'étaient déjà concertés avant le début de l'instruction. On a la preuve qu'ils se sont téléphonés. Ils ont tous fait la même déclaration et ils ne se souvenaient de rien. Ils ont alors été confondus par les images vidéos", poursuit l'avocat de Hedi. "Finalement, ils ont eu des bribes de souvenirs, progressivement. Concernant le policier incarcéré, sa mémoire est revenue le 4 août. Il disait qu'il n'était pas sur les lieux. Il s'est finalement souvenu qu'il avait tiré, pour protéger ses camarades, car mon client, Hedi, avait une attitude menaçante. Donc, Hedi aurait chargé, tout seul, sept policiers armés ? Cela heurte l'intelligence et l'entendement. Les témoignages sont nombreux et ne vont pas dans ce sens".
Les syndicats de police satisfaits
"Nous sommes, depuis le départ, contre ce placement en détention provisoire qui était injuste pour notre collègue", rappelle Rudy Manna, porte-parole du syndicat Alliance Police Nationale. "La suite de l'enquête va se dérouler correctement. Notre collègue se présentera à toutes les convocations. Il ne s'enfuira pas à l'étranger et ne communiquera pas avec les autres policiers impliqués. Le contrôle judiciaire aurait largement suffi", affirme-t-il. "Nous sommes ravis que ce policier retrouve son enfant, sa famille. Les policiers n'ont pas leur place en prison lorsqu'ils sont dans l'exercice de leur travail. Cette affaire a créé un tournant dans la police, il y aura un avant et un après. Cette incarcération, ainsi que celle de notre collègue de Nanterre, ont provoqué un séisme".
"Cette libération est assez évidente, elle répond à notre revendication principale de ne pas placer les policiers en détention provisoire lorsqu'ils sont mis en cause dans l'exercice de leurs fonctions", se félicite Linda Kebbab, déléguée nationale du syndicat Unité SGP Police FO. "Depuis l'incarcération de notre collègue il y a un peu plus d'un mois, les investigations ont évolué et les magistrats ont estimé qu'un policier en détention n'était pas nécessaire pour mener à bien l'enquête. Est-ce qu'il était réellement utile de l'envoyer en prison ?", s'interroge la syndicaliste.
"Je déplore que notre collègue remis en liberté soit interdit d’exercer, alors que des tas de métiers dans la police, sans contact avec le public, existent. Il faut impérativement revoir ces interdictions strictes", réclame Linda Kebbab. "J'ai également une pensée pour notre collègue de Nanterre, qui est toujours écroué. Il devrait lui aussi être remis en liberté, au regard de notre revendication".