Gilets jaunes : «J’ai été très clairement visé» affirme Jérôme Rodrigues. Son avocat évoque un «tir de flashball».

Figure du mouvement des Gilets jaunes, Jérôme Rodrigues a été blessé à l’œil droit sur la place de la Bastille. Une double enquête de l'IGPN (Inspection générale de la police nationale) a été ouverte à la demande de la préfecture de police et du parquet de Paris.
Gilets jaunes : «J’ai été très clairement visé» affirme Jérôme Rodrigues. Son avocat évoque un «tir de flashball».
(capture écran Facebook)
Par Actu17
Le dimanche 27 janvier 2019 à 14:40 - MAJ dimanche 27 janvier 2019 à 15:21

Jérôme Rodrigues était en train de réaliser une vidéo en direct sur Facebook, sur la place de la Bastille ce samedi après-midi, durant la manifestation des Gilets jaunes lorsqu'il a été gravement blessé à l’œil. Tombé au sol, il a rapidement été pris en charge par les sapeurs-pompiers.

Son avocat, Me Philippe de Veulle, a réagi le premier ce samedi matin sur BFMTV, réfutant la thèse de l'utilisation d'une grande de désencerclement évoquée par la préfecture de police.

Appelée également GMD (Grenade à main de désencerclement), cette arme est composée de trois rangées de six plots de caoutchouc dur (en plus du bouchon allumeur qui est lui aussi gainé de caoutchouc), qui sont projetés de façon circulaire à 360 degrés au moment où elle explose.

Il s'agit d'une arme régulièrement utilisée dans le maintien de l'ordre mais également dans les interventions difficiles des policiers et des gendarmes, qui a été la cible de nombreuses critiques notamment lors des manifestations contre la Loi travail, en 2016.

L'avocat de Jérôme Rodrigues affirme avoir récupéré une cartouche de flashball

"J'ai des éléments matériels dans le sens que c'est un tir de flashball. Le flashball va être remis dans les mains de la commissaire divisionnaire de l'IGPN, qui a contacté la sœur de mon client hier soir" a annoncé Me Philippe de Veulle.

"Nous attendons l'enquête et savoir si les analyses ADN correspondent avec l'ADN de Jérôme Rodrigues. (...) Ce sont des témoins qui nous l'ont donné, une jeune femme qui a vu les événements au pied de la colonne de la Bastille, qui a vu les forces de l'ordre avancer, tirer au flashball sur Jérôme" a précisé le conseil de la victime, à la chaîne d'informations.

"Je me prends une grenade au bas des pieds qui m'assourdit et tout de suite après je me prends un tampon dans l'oeil"

De son côté, Jérôme Rodrigues affirme avoir été visé "délibérément" et raconte la scène dans un interview à l'hôpital, donné à plusieurs médias.

"Moi qui prône le pacifisme, j'ai voulu aller récupérer quelques jaunes qui étaient sur la Bastille pour leur dire de dégager d'ici. (...) A cet instant précis-là, je vois un policier avec un LBD dans la main, et je remarque que pour moi il n'a pas de caméra. Je me recule à ce moment-là pour les laisser charger, pour leur laisser le libre accès à leur action, et je me prends une grenade au bas des pieds qui m'assourdit et tout de suite après je me prends un tampon dans l'oeil" raconte-t-il.

Une "tentative de meurtre orchestrée"

"Je suis une figure du mouvement, du moins à l'échelle de la manifestation parisienne, et j'ai été plusieurs fois pointé du doigt par la police sur d'autres manifestations, donc je pense qu'ils savaient très bien sur qui ils tiraient" a également déclaré Jérôme Rodrigues.

En début de matinée, Jérôme Rodrigues écrivait sur Facebook avoir été victime d'une "tentative de meurtre orchestrée par le policier mandaté par Macron et son chien Castaner". Un message finalement modifié vers 10h30 mais qui reste toujours visible : "Macron et Castaner ! Tu pourras m’enlever un œil, un bras, une jambe... ON LÂCHERAS RIEN ! LA FAMILLE !".

Au sujet de sa blessure à l'oeil droit, Jérôme Rodrigues a été opéré durant plusieurs heures la nuit dernière. Ce dernier attend d'avoir la conclusion des médecins à savoir si il va perdre l'usage de son œil, ou pas, a précisé son avocat ce matin.

Une double enquête ouverte et confiée à l'IGPN

L'inspection générale de la police nationale (IGPN) a été saisi par la préfecture de police afin qu'une enquête administrative soit ouverte, pour déterminer les circonstances exactes de la blessure de Jérôme Rodrigues, ce proche d'Éric Drouet.

Le parquet de Paris a à son tour saisi la "police des polices" dans le cadre de l'ouverture d'une enquête judiciaire.

Les images de Jérôme Rodrigues confirment l'utilisation d'une GMD

Les faits se sont déroulés dans le cadre d'affrontements par séquence avec les forces de l'ordre, comme il est possible de le voir sur les différentes images de journalistes en direct. Des violences certes moins intenses que celles du 1er décembre ou du 5 janvier par exemple, mais qui ont tout de même entraîné des caillassages et le jet d'un cocktail Molotov à l'encontre des forces de l'ordre.

Si Jérôme Rodrigues et son avocat mettent en cause le tir d'un Lanceur de balles de défense (LBD 40), sans toutefois nier l'utilisation d'une grenade de désencerclement, les images du Facebook Live que Jérôme Rodrigues réalisait au moment des faits, confirment l'utilisation d'une GMD, à 9m20. Dans le moment suivant l'explosion, la victime tombe au sol après avoir fait plusieurs pas en arrière.

(capture écran Facebook Jérôme Rodrigues)

Jérôme Rodrigues a-t-il été au moment même de l'explosion de la GMD, touché par un tir de LBD 40 ? Cette grenade de désencerclement est-elle l'unique raison de sa blessure ? Son utilisation était-elle justifiée ? L'enquête devra le déterminer.