Strasbourg : Soupçonné d'animer une plateforme mondiale de pédocriminels sur le darknet, un homme écroué

C'est un homme de 64 ans soupçonné d'être à la tête de plusieurs sites et forums diffusant des images pédopornographiques sur le darknet, qui a été interpellé à Strasbourg (Bas-Rhin), après plusieurs mois d'enquête des policiers de l'OFMIN. Le sexagénaire est également soupçonné d'agressions sexuelles sur mineur. Mis en examen à Paris ce vendredi, il a été placé en détention provisoire.
Strasbourg : Soupçonné d'animer une plateforme mondiale de pédocriminels sur le darknet, un homme écroué
Illustration. (Shutterstock)
Par Stéphane Cazaux
Le vendredi 26 janvier 2024 à 22:22 - MAJ vendredi 26 janvier 2024 à 23:44

Un homme de 64 ans a été interpellé ce mardi à son domicile de Strasbourg (Bas-Rhin). Il est soupçonné d'avoir créé et d'animer plusieurs plateformes sur le darknet réunissant des pédocriminels, sur lesquelles des milliers d'images ont été diffusées, a indiqué le parquet de Paris, confirmant une information du Parisien. Le sexagénaire a été mis en examen à Paris ce vendredi, avant d'être placé en détention provisoire, a appris Actu17.

Cette interpellation est l'aboutissement de plusieurs mois d'enquête de l'office mineurs (OFMIN), qui a été créé en septembre dernier. Ce dossier a débuté par une coopération internationale, notamment avec Europol, et d'une information d'un service étranger indiquant qu'un homme domicilié à Strasbourg était à la tête de sites et de forums sur le darkweb, où des images et des vidéos pédopornographiques sont échangées. Le suspect utilise de nombreux pseudonymes différents ainsi que le navigateur TOR, un réseau informatique mondial conçu pour permettre aux utilisateurs de naviguer sur Internet de manière anonyme. Ce système, qui s'appuie sur une technique appelée "routage en oignon", masque l'identité et la localisation de ses utilisateurs, rendant ainsi difficile le suivi de leurs activités en ligne. Cette caractéristique fait de TOR un outil fréquemment utilisé pour accéder au darknet et à ses contenus, dont certains peuvent être illicites.

L'OFMIN a été chargée de cette enquête dès le mois de septembre dernier, sous la direction de la section de lutte contre la cybercriminalité du parquet de Paris (J3). Durant plusieurs semaines, les investigations, auxquelles l'OFAC (office anti-cybercriminalité) de Strasbourg a participé, ont permis de confirmer les activités illicites de ce sexagénaire. L'interpellation du suspect a été réalisée avec l'appui des policiers de la brigade de recherche et d'intervention (BRI) du service interdépartemental de police judiciaire (SIPJ) après plusieurs jours de surveillance, indique une source proche de l'affaire. "Il fallait interpeller cet homme, dans les meilleures conditions, sans qu'il puisse accéder à ses ordinateurs au moment de l'intervention", décrit la même source. "Il était tout à fait possible qu'il ait mis en place un bouton d'urgence pour formater ses disques durs".

Dix ordinateurs, 200 disques durs

Lors de la perquisition de son logement, les enquêteurs de l'OFMIN ont découvert pas moins de dix ordinateurs et 200 disques durs, qui vont être exploités dans le cadre des investigations. "Le suspect hébergeait lui-même les plateformes sur des serveurs se trouvant à son domicile, pour être plus discret", confie notre source. Des plateformes que ce sexagénaire, aux revenus très modestes, aurait lui-même créé.

"Il s’agit de la première plateforme du darknet qui a ainsi pu être démantelée en matière de pédo-pornographie en France", souligne le parquet de Paris. Le suspect est par ailleurs soupçonné d'avoir commis des agressions sexuelles sur des mineurs de son entourage, mais également d'avoir sollicité des mineurs en ligne. Présenté à un juge d'instruction ce vendredi, il a été mis en examen des chefs d'"administration d'une plateforme en ligne pour permettre une transaction illicite", "détention, diffusion, enregistrement / fixation, d’image de mineur présentant un caractère pédopornographique", de "corruption de mineur par une personne mise en contact avec la victime par un réseau de communication électronique", et d'"agression sexuelle incestueuse sur mineur par un ascendant majeur".

Une première en France à deux niveaux

"C'est la première fois qu'une personne est mise en examen du chef 'd’administration d’une plateforme en ligne pour permettre une transaction illicite', dans le cadre d'une enquête pour des faits de pédocriminalité", observe une source judiciaire. Il s'agit d'une infraction qui a été créée par la loi du 24 janvier 2023 et qui est réprimée de 5 ans d’emprisonnement et 150 000 euros d’amende. "Elle réprime le fait, pour un opérateur de plateforme restreinte à des usagers utilisant l’anonymat ou ne respectant pas les obligations du code de la consommation, de permettre sciemment la cession de produits illicites sur celle-ci", rappelle le parquet de Paris.

Les policiers de l'OFMIN s'étaient déjà illustrés le mois dernier avec une vaste enquête dans laquelle 80 suspects ont été interpellés lors d'un coup de filet dans 53 départements, comme révélé par Actu17.