Affaire Michel Zecler : procès requis devant la cour criminelle pour trois policiers

En 2020, le producteur de musique Michel Zecler avait été violemment frappé par plusieurs policiers dans son studio parisien, des faits qui avaient suscité une large indignation. Le parquet de Paris vient de requérir un procès devant la cour criminelle départementale pour trois fonctionnaires, poursuivis notamment pour "faux en écriture publique" et, pour deux d’entre eux, pour "violences aggravées" à caractère raciste. Un quatrième policier pourrait être jugé séparément pour des violences avec une grenade lacrymogène. La décision finale appartient désormais au juge d’instruction.
Affaire Michel Zecler : procès requis devant la cour criminelle pour trois policiers
Les faits ont été filmés par une caméra de surveillance. (capture écran vidéo)
Par Actu17
Le jeudi 30 janvier 2025 à 20:15

Le parquet de Paris a requis un procès devant la cour criminelle départementale pour trois policiers soupçonnés d’avoir participé à l’agression de Michel Zecler en novembre 2020 et d’avoir falsifié un procès-verbal pour masquer les faits. L'information, révélée jeudi 30 janvier par une source proche du dossier citée par l'AFP, a été confirmée par le parquet.

Le ministère public demande que ces trois policiers, un brigadier et deux gardiens de la paix, soient jugés pour "faux en écriture publique par personne dépositaire de l’autorité publique", une infraction criminelle. Deux d’entre eux, Aurélien L., 27 ans, et Philippe T., 48 ans, devront également répondre de violences aggravées, caractérisées notamment par leur nature raciste. Michel Zecler affirme en effet qu’Aurélien L. lui a lancé "sale nègre" et que Philippe T. lui a tenu des propos racistes. Pour le troisième policier, Pierre P., 36 ans, ce caractère raciste n’a pas été retenu par le parquet.

Un quatrième fonctionnaire est également concerné par une procédure distincte devant le tribunal correctionnel. Il est soupçonné d’avoir utilisé une grenade lacrymogène contre Michel Zecler et une dizaine de jeunes hommes à l’extérieur du studio de musique où le producteur a été agressé.

L’issue de ces réquisitions dépend désormais du juge d’instruction, qui décidera de l’ouverture ou non d’un procès. Une telle audience, si elle est retenue, serait exceptionnelle, car il est rare que des policiers soient jugés devant une juridiction criminelle pour des faits de faux en écriture publique ou de violences racistes.

Une «forte odeur de cannabis»

Les faits remontent au 21 novembre 2020. En début de soirée, Michel Zecler est violemment frappé dans son studio de musique parisien après un contrôle déclenché notamment en raison d’une supposée "forte odeur de cannabis". L’enquête ouverte pour "violences" et "rébellion" à son encontre est rapidement classée sans suite.

Cinq jours plus tard, la publication des images de vidéosurveillance par le média Loopsider contredit la version initiale des policiers et provoque une vague d’indignation, y compris au plus haut sommet de l’État. Placés en garde à vue, les policiers finissent par reconnaître des coups injustifiés, qui auraient entraîné 45 jours d’incapacité totale de travail (ITT) pour Michel Zecler. Deux des fonctionnaires ont été placés en détention provisoire à l’issue de leur mise en examen. Ils ont finalement été libérés sous contrôle judiciaire un mois plus tard.

«La résistance passive dont a fait preuve Michel Zecler au moment des faits ne saurait légitimer les coups»

Selon les réquisitions du parquet, la "persistance" des policiers à poursuivre le contrôle a provoqué l’escalade des violences. Le ministère public souligne que "la résistance passive dont a fait preuve Michel Zecler au moment des faits ne saurait légitimer les coups", jugés "nullement nécessaires et totalement disproportionnés".

Concernant le faux en écriture publique, le parquet identifie onze passages considérés comme mensongers dans le procès-verbal litigieux, dénonçant "une présentation volontairement erronée des faits" destinée à justifier l’intervention des policiers. Il rappelle que leur statut implique une parfaite connaissance de cette infraction.

Enfin, s’il note les "dénégations" d’Aurélien L. et de Philippe T. concernant les insultes racistes, le parquet estime que le premier "n’a pas hésité à déformer la réalité des faits" dans le procès-verbal d’interpellation, ce qui le rend crédible pour un mensonge sur ce point. Il ajoute que des "publications comportant des propos racistes" ont été retrouvées dans son téléphone.

Une confrontation entre Michel Zecler et deux des policiers a eu lieu le 27 février 2024 afin de déterminer si les insultes racistes ont bien été prononcées. Le producteur maintient ses accusations, malgré les dénégations des fonctionnaires.