Le samedi 24 septembre 2022 à 10:58
Elle avait plaidé "l'erreur" de "bonne foi". L'ex-maire de Pontault-Combault (Seine-et-Marne), Monique Delessard, a été condamnée vendredi par la cour d'assises de Paris à quinze mois d'emprisonnement avec sursis pour avoir signé il y a quinze ans un faux acte de mariage de son prédécesseur, dans le coma.
Après deux jours de procès, ce verdict semble clore une longue procédure qui avait déjà conduit deux fois l'ancienne élue devant la justice. A la fin de son interrogatoire par la cour, Monique Delessard a assuré qu'elle "accepterait" la décision, "quelle qu'elle soit". Elle a semblé soulagée après le délibéré. L'accusation avait requis à son encontre douze mois de prison avec sursis.
"Je reconnais totalement que j'ai fait une grosse erreur, sans doute la plus grosse erreur de ma vie. En trente-huit ans de mandats, c'est la seule et unique", a mis en avant, droite à la barre, Mme Delessard, retraitée de la politique depuis juillet 2021. "Depuis quinze ans, je porte ce fardeau et je regrette cet acte. Ce sont trente secondes sur trente-huit ans de mandats", a martelé la septuagénaire, carré blond et fine silhouette.
Le 30 octobre 2007, alors première adjointe, elle paraphe comme officier d'état-civil un acte de mariage unissant le maire de Pontault-Combault Jacques Heuclin (PS) à Armelle Reffait, sa concubine avec laquelle il est pacsé depuis huit ans et a une fille de 13 ans.
Selon le registre, Monique Delessard et deux "témoins", le directeur de cabinet de Jacques Heuclin et un autre adjoint, se sont "transportés" au domicile du député-maire à Pontault-Combault, où les "époux" se sont dit "oui". Or, à l'heure et date de l'acte de mariage, le marié était hospitalisé à Paris, dans le coma, intubé, intransportable. En somme, "hors d'état de manifester sa volonté", répète la présidente Charlotte Bilger. Jacques Heuclin décèdera le lendemain.
La supercherie a été découverte quelques mois plus tard. Trois filles du défunt maire nées d'une précédente union avaient engagé une action au civil pour faire annuler le mariage frauduleux, alertant le procureur. Après une rapide enquête, l'affaire avait été renvoyée en correctionnelle.
«Sans le lire»
Monique Delessard, qui a pris la tête de la mairie de Pontault-Combault en 2008, a été condamnée un an plus tard par le tribunal correctionnel de Melun à deux mois d'emprisonnement avec sursis pour "faux". Une peine "acceptable" pour l'ancienne élue, qui était à l'époque également vice-présidente du conseil départemental. Le parquet a fait appel de cette condamnation.
En 2010, la cour d'appel de Paris avait plus lourdement condamné Monique Delessard, à quinze mois d'emprisonnement avec sursis et à trois ans de privation de ses droits civiques et familiaux, impliquant son inéligibilité.
L'élue avait formé un pourvoi et obtenu de la Cour de cassation l'annulation de sa condamnation, au motif que les faits reprochés constituaient un crime et non un délit et méritaient donc d'être jugés devant une cour d'assises. Elle encourait quinze ans de réclusion.
Depuis sa mise en cause dans cette ancienne affaire, Monique Delessard affirme avoir signé le document "sans le lire". "Il m'a été apporté en urgence par le directeur de cabinet de Jacques Heuclin, qui était son bras droit", a justifié l'accusée, qui a maintenu ne pas avoir "lu cet acte" de mariage, et l'avoir "signé en toute bonne foi", pensant que c'était la "dernière volonté" du maire et que tout était en règle.
Monique Delessard "l'a fait en toute bonne foi car elle m'a toujours fait confiance", a également assuré devant la cour l'ex-directeur de cabinet de Jacques Heuclin, Serge Crippa, pointant l'émotion vive alors que le maire était à l'article de la mort.
M. Crippa a été définitivement condamné pour "faux", tout comme l'autre "témoin" de mariage, l'ex-secrétaire de Jacques Heuclin qui a imité sa signature, et Armelle Reffait. Citée comme témoin au nouveau procès de Monique Delessard, la "veuve" s'est fait porter pâle.