Jugée pour avoir tué sa belle-mère sénile de 47 coups de couteau et blessé son mari dément à Allauch

Pour la juge d’instruction, "sa préoccupation première était de garder la mainmise sur le patrimoine" de sa belle-mère.
Jugée pour avoir tué sa belle-mère sénile de 47 coups de couteau et blessé son mari dément à Allauch
Illustration. (Franck Fife / AFP)
Par Actu17
Le mardi 8 février 2022 à 20:12

Jugée pour le meurtre de sa belle-mère impotente et pour la tentative de meurtre commise sur son époux atteint de démence, Danièle Careddu, 66 ans, veut convaincre la cour d’assises des Bouches-du-Rhône qu’elle était "à bout" et a agi pour mettre fin à "un enfer".

Dans la nuit du 2 au 3 juin 2018 dans la maison familiale d'Allauch, près de Marseille, lorsque les pompiers découvrent le corps sans vie de Paulette Dufossé, 85 ans, poignardée de 47 coups de couteau et égorgée sur son lit, ainsi que son fils Marc, 58 ans, blessé d’une dizaine de coups de couteau, Danièle Careddu, mariée à Marc, avoue qu'elle a avalé "une demi-bouteille de whisky pour [se] donner du courage".

A la barre Danièle Careddu affirme n’avoir plus aucun souvenir de ce soir-là, juste d’éplucher des courgettes, d’avoir vu son mari dans le reflet d'une porte et de s’être emparée d’un couteau, "comme j’aurais pris un bâton sans savoir ce que je voulais en faire". "Je le sais que c’est moi, il n’y a pas de fantôme chez moi mais je ne m’en souviens pas. Je me suis torturée le cerveau pour me souvenir, vous ne pouvez pas savoir comme j’en souffre car, dans ma tête, ce n’est pas moi qui ai fait ça", poursuit la sexagénaire.

Au tribunal, témoins, proches, voisins et amies brossent le portrait d’une "sainte", d'une "femme gentille", qui s’est épuisée dans l'aide apportée à son mari atteint du syndrome de Korsakoff, une démence due à son alcoolisme, et à une belle-mère devenue impotente à laquelle elle avait fait la promesse de ne jamais la placer en maison de retraite.

"C’est dramatique, elle n’a pas été trop aidée par le milieu médical", déplore Martine, une amie de vingt-cinq ans. Deux jours avant le drame, elle avait vu "la maison sans dessus dessous", les murs de l’appartement une nouvelle fois souillés d’excréments par son mari. "Comme d’habitude, jusqu’à 2 heures du matin, elle a tout passé à l’eau de javel", témoigne cette femme.

"Gros gâchis"

Brigitte, une voisine, déplore "un gros gâchis". Comme beaucoup, elle s’attendait surtout à ce que "Danièle mette fin à ses jours". "Peut-être qu’elle n’a pas fait tout ce qu’il fallait, mais il faut vivre les situations pour les comprendre", lance-t-elle aux jurés.

Incarcérée depuis les faits, Danièle Careddu n'avait pas convaincu la juge d’instruction des raisons de son "coup de folie". Pour la magistrate, "sa préoccupation première était de garder la mainmise sur le patrimoine" de sa belle-mère. Ce mobile d’argent est contesté par Romain Dufossé, le fils du couple, qui explique que sa grand-mère "était d’accord" pour l’utilisation de son compte bancaire. Face aux jurés, Romain Dufossé, 37 ans, a évoqué "une grand-mère adorée, exemplaire", mais devenue les derniers temps "méchante, haineuse vis-à-vis de [sa] mère. Elle la traitait de salope, de connasse".

"Je comprends qu’elle ait pété les plombs"

Il fait porter la responsabilité de ce drame sur son père et son alcoolisme qui "ont bousillé toute la famille". Interrogé sur l’acte criminel de sa mère, son fils, qui s’est constitué partie civile, confie qu’il "ne pardonne pas. Mais si elle est arrivée là, c’est qu’elle n’avait plus d'échappatoire, je comprends qu’elle ait pété les plombs". "Elle n’a pas pu supporter la charge qu’elle s'était imposée mais elle n’a pas été seule, sans proposition d’aide", a souligné de son côté l'avocate générale Sophie Bot a propos de l'accusée qui a refusé l’aide des médecins, des services sociaux.

Son psychiatre lui avait proposé de rédiger une dérogation permettant le placement définitif de son mari en Ehpad, malgré son jeune âge pour y être admis. Marc Dufossé, unanimement dépeint comme "ingérable", était régulièrement admis en milieu psychiatrique d’où il fuguait sans cesse. "On nous disait qu’il n’était pas assez fou pour aller en psychiatrie et trop fou pour le garder en Ehpad", a indiqué son ex-belle fille. Le verdict est attendu mercredi soir.