Le lundi 21 mars 2022 à 14:24
Le procès de quatre sympathisants d'extrême droite pour la violente agression de deux jeunes hommes en 2017, le soir de l'élection d'Emmanuel Macron, s'est ouvert lundi devant la cour d'assises à Nantes.
Le 7 mai 2017, Erwan David, 18 ans au moment des faits, et Steven Dardenne, 16 ans, rentrent chez eux en vélo quand ils sont poussés au sol puis frappés à coups de pieds, de barre de fer et de bouteille en verre, par des sympathisants du GUD, un syndicat étudiant d'extrême droite, dissout depuis. Conduit inconscient à l'hôpital, Erwan David se voit prescrire un an d'interruption totale de travail (ITT).
« Massacrée en quelques secondes »
"Erwan souffre de séquelles neuropsychologiques. Il a des troubles de la concentration, des difficultés à accomplir certains gestes, un sommeil très perturbé", énumère son conseil, Me Benoît Poquet, qui évoque une vie "massacrée en quelques secondes". Parties civiles, Erwan David et Steven Dardenne ont assisté à l'audience assis côte à côte, vestes sur le dos, échangeant à voix basse pendant l'examen de la personnalité des accusés.
Les deux agresseurs présumés d'Erwan David, François-Mamès Cosseron de Villenoisy, 23 ans aujourd'hui, et Joyce Burkat, 32 ans, comparaissent jusqu'à vendredi pour des violences ayant entrainé une infirmité permanente, en réunion, avec armes et préméditation. Ils encourent jusqu'à 15 ans de réclusion criminelle.
Moins mal en point à l'issue de l'agression, Steven Dardenne s'était vu prescrire une ITT de cinq jours. Ses agresseurs présumés, Antoine Desbas, 23 ans, Matthieu Gaultier de la Richerie, 24 ans, et Joyce Burkat, sont jugés pour des violences en réunion, avec usage d'une arme et préméditation. Un cinquième accusé, Tanguy Martin, 20 ans au moment des faits, est mort accidentellement pendant la procédure.
« Violence inouïe »
A la demande de leurs avocats, les accusés, qui comparaissent libres après avoir effectué chacun entre 8 et 15 mois de détention provisoire, se sont assis sur un banc de la salle d'audience plutôt que dans le box. A la barre, seul Joyce Burkat, tatouages dans le cou et pull bleu marine, a refusé de reconnaître les faits qui lui sont reprochés, affirmant ne pas avoir "porté de coups" aux victimes.
Le soir de l'agression, un rassemblement contre le nouveau président avait réuni dans les rues de Nantes des militants antifascistes et anticapitalistes. Au cours de l'enquête, l'un des mis en cause avait affirmé avoir été pourchassé par des manifestants. Croyant reconnaître les deux victimes un peu plus tard dans la soirée, il avait décidé de "régler des comptes". "Dans cette agression il y a une violence inouïe d'un milieu d'extrême droite qu'on croyait tapi dans l'ombre, dans le contexte d'une élection qui a manifestement exacerbé les rancœurs et tensions", résume Me Poquet.
« Il était très jeune, il n'est plus le même »
Avant de se rapprocher du GUD, Joyce Burkat avait été membre du groupe Génération identitaire, dissout en 2021, a-t-on appris lors de l'audience. François-Mamès Cosseron de Villenoisy et Matthieu Gaultier de la Richerie avaient quant à eux adhéré adolescents à l'Action française, mouvement politique d'extrême droite d'obédience royaliste. Les accusés affirment avoir désormais coupé les ponts avec le GUD et toute autre organisation politique. "Mon client était simple sympathisant au moment des faits, pas adhérent. Il était très jeune, il n'est plus le même", assure le conseil d'Antoine Desbas, Me Jean-Guillaume Le Mintier.
Au cours du procès, l'avocat entend retracer le "cheminement psychologique" de son client, jusqu'à et depuis son "endoctrinement". Erwan David et Steven Dardenne doivent être entendus mardi après-midi. "Ce qu'(Erwan David) attend c'est que ses agresseurs s'expliquent et disent qui a fait quoi", précise son avocat, qui ajoute : "Il faut qu'on sache enfin ce qui a pu mener ces jeunes gens à faire de son visage un ballon de football". Le procès doit durer jusqu’au 25 mars.