Le lundi 23 janvier 2023 à 11:17
Ne pas nier les évidences, tout en minimisant leur participation : ce devrait être la délicate ligne de défense des six accusés jugés à partir de lundi à Lyon pour l'attaque en 2017 d'un fourgon de transport de fonds en Suisse, au butin record. Le procès, initialement prévu en novembre 2021, avait été renvoyé, un accusé ayant contracté le Covid et la cour d'assises du Rhône estimant "nécessaire de juger les six accusés ensemble".
Ces derniers, originaires de la région lyonnaise, avaient été interpellés en mai 2017 près d'Annecy (Haute-Savoie) quelques heures après l'attaque nocturne d'un fourgon de transport de fonds, entre Genève et Lausanne. Ils avaient été arrêtés en possession du butin, constitué de billets de banque de différentes devises entassés dans des sacs, de quatre lingots d'or, ainsi que plusieurs milliers de pierres précieuses, pour une valeur évaluée au total à plus de 40 millions de francs suisses (quelque 40,3 millions d'euros au cours actuel).
Selon l'accusation, les suivis préalables de la police judiciaire, avec géolocalisation et vidéosurveillance, les saisies en flagrant délit opérées par la brigade de recherche et d'intervention (BRI) et les traces d'ADN sont autant de preuves accablantes de leur implication. "Le rôle de chacun n'est pas pour autant établi avec certitude", estime un avocat de la défense. Prévu sur dix jours, le procès s'annonce tendu.
Selon l'ordonnance de renvoi des juges lyonnais de la juridiction inter-régionale spécialisée (JIRS), l'attaque résulte d'une "organisation structurée et hiérarchisée", illustrant les spectaculaires incursions du banditisme lyonnais en territoire suisse.
Fusils d'assaut, brassards police, véhicules volés
Renseignements précis, armement lourd, préparatifs, itinéraires de replis, interception de fourgon : ce mode opératoire a été utilisé dans huit braquages de fourgons en Suisse au cours des sept dernières années.
D'autres dossiers de ce type sont en cours d'instruction à Lyon, dont celui de Chavornay, qui concerne l'enlèvement le 8 février 2018 de la fille d'un convoyeur à Lyon, pour obliger son père à détourner son véhicule, dans le canton de Vaud.
Justice franco-suisse: Six hommes jugés à Lyon pour le juteux braquage de Nyon (VD) https://t.co/dyzbcssKaW
— L'actu genevoise (@tdgGeneve) January 20, 2023
Dans l'affaire jugée à partir de lundi, le groupe de suspects est accusé d'avoir intercepté un fourgon de la société Loomis sur une bretelle d'autoroute, près d'Eysins, entre Genève et Lausanne, en brandissant des fusils d'assaut, et en utilisant trois véhicules volés, des gyrophares, des brassards de police pour les uns, des cagoules pour les autres. Les convoyeurs ont été menacés et ligotés, puis emmenés dans les coffres de deux voitures, pendant qu'un des braqueurs prenait le volant du fourgon, jusqu'à un chemin rural situé près de Divonne-les-Bains (Ain), en passant la frontière franco-suisse.
Interpellés quelques heures plus tard
Là, les braqueurs ont transféré le butin, avant d'incendier le fourgon et une des deux voitures. Ils ont aussi aspergé les convoyeurs d'un produit javellisé, afin de faire disparaître des traces compromettantes. Quelques heures après l'attaque, les six hommes ont été interpellés dans une villa de Chavanod, près d'Annecy, en Haute-Savoie.
Pendant le procès, les enquêteurs de la brigade antigang de Lyon viendront exposer à la barre le travail d'investigation qui a permis ce flagrant délit d'anthologie.
Tout est parti d'un renseignement sur les projets d'un malfaiteur de la région lyonnaise connu pour des vols à main armée en Suisse. Plusieurs mois de surveillance de ses activités et fréquentations ont permis d'identifier cette villa comme un lieu pouvant servir de base de repli. Des recoupements ont ensuite permis d'y détecter la présence de sa bande quelques heures après l'attaque du fourgon dans le canton de Vaud. Outre le butin, plusieurs armes ont été retrouvées sur place, dont cinq fusils d'assaut et de l'équipement utilisé pour le braquage. Des empreintes ADN de plusieurs suspects ont été relevées sur les objets saisis.
Le procès est programmé sur dix jours, avec un verdict attendu le 3 février. Les accusés encourent une peine maximale de trente ans de réclusion criminelle pour vol à main armée en bande organisée, et la réclusion criminelle à perpétuité pour ceux en état de récidive légale.