Le jeudi 7 avril 2022 à 22:13
Lors du procès en appel du "viol du 36", la plaignante canadienne, qui accuse deux policiers de l'avoir violée au 36 quai des Orfèvres, a fait part jeudi de sa volonté "d'oublier" les faits dénoncés, vieux maintenant de huit ans et aux conséquences toujours douloureuses.
"J'aimerais bien retrouver ma vie. Cela fait huit ans que je suis en analyse pour essayer de passer à autre chose", a indiqué à la barre Emily Spanton, 42 ans, qui s'exprimait pour la première fois dans ce procès en appel. Sans emploi, trop accaparée par cette affaire judiciaire en cours, elle vit au Canada au domicile de ses parents, dont elle ne sort "que pour faire du volontariat à l'église". "J'espère que c'est la dernière fois que j'ai à venir ici", a-t-elle expliqué, la voix troublée par l'émotion, en référence à ses quatre voyages à Paris en quatre ans. Après le premier procès en 2019, au cours duquel les accusés ont été condamnés à sept ans de prison, le procès en appel a en effet été renvoyé deux fois, en 2020 puis en 2021.
"Mon français s'améliore un peu à chaque fois", a-t-elle noté, non sans ironie. Devant la cour d'assises, Emily Spanton comprend ce qui lui est dit en français mais répond en anglais. En larmes, elle a eu du mal à être précise face aux questions sur les détails des viols qu'elle dénonce, expliquant faire une psychothérapie pour "oublier" cette soirée du 22 avril 2014, à propos de laquelle elle fait encore des cauchemars. Selon ses avocats, Emily Spanton a déjà dû s'exprimer une douzaine de fois, lors de l'enquête, sur les faits. "Ce n'est pas évident, et ce n'est pas de votre faute, de reconstruire ce qu'il s'est passé", a reconnu l'avocat général Christophe Auger.
«Je sais que ces deux hommes-là m'ont violée»
Ce soir-là, la plaignante fait la rencontre de plusieurs policiers dans un pub irlandais situé en face du 36 quai des Orfèvres, siège d'alors de la PJ parisienne. Alors que l'ambiance est au flirt, les agents l'invitent dans leurs bureaux. Là, elle explique avoir subi cinq pénétrations, orales ou vaginales, de la part d'au moins deux policiers. "Je sais que ces deux hommes-là m'ont violée", a-t-elle réaffirmé jeudi, en pointant les accusés du doigt. "On peut embrasser une personne sans avoir envie de coucher avec elle", a-t-elle rappelé à la barre, alors que la défense l'interrogeait sur son côté "entreprenante" avec les accusés au bar.
Ces derniers contestent les faits qui leur sont imputés et assurent avoir eu des rapports sexuels consentis avec la jeune femme. Ils seront entendus sur le fond vendredi matin. Le verdict sera rendu le 22 avril.