«Violeur de la Sambre» : jugé pour une trentaine de viols ou tentative, Dino Scala invoque un instinct «de chasseur»

L'accusé est jugé devant les assises du Nord pour 17 viols, 12 tentatives de viol et 27 agressions ou tentatives d'agression sexuelle. Il y a 56 victimes.
«Violeur de la Sambre» : jugé pour une trentaine de viols ou tentative, Dino Scala invoque un instinct «de chasseur»
Dino Scala dans les années 2000 quand il était président du club de Berlaimont. (Belloumi / PhotoPQR / Maxppp)
Par Actu17 avec AFP
Le samedi 11 juin 2022 à 12:12

Dino Scala, surnommé le "violeur de la Sambre", a invoqué vendredi un "instinct chasseur, prédateur", pour expliquer 30 ans de viols et agressions sexuelles, au premier jour de son procès vendredi devant les assises du Nord. Calme et volubile à la barre, l'accusé reconnaît avoir "commis des agressions sexuelles et des viols", comme il l'avait fait pendant l'enquête, sur "la majorité des faits", selon son avocate.

A 61 ans, il comparait pour 17 viols, 12 tentatives de viol et 27 agressions ou tentatives d'agression sexuelle, commis contre 56 victimes entre 1988 et 2018. "Vous vous sentiez fort ?", l'interroge une avocate : "oui, fort, je prenais le dessus", répond-il. Au président de la cour qui rappelle que selon l'enquête de personnalité, il n'est "pas spécialement porté sur le sexe", il lance : "oui, c'est bizarre". "A côté de ça (...) de ce que j’ai pu accomplir comme méfaits, j’ai toujours eu une vie normale", ajoute cet ancien ouvrier et entraîneur local de football, père de cinq enfants de deux mariages.

Rencontrer en prison "psychiatre, psychologue", "m’a permis de ressortir tout ce que j’avais, comme colère et frustrations", développe-t-il, devant une salle où se pressent plusieurs dizaines de victimes ou proches.

«Bon à rien»

Il évoque une adolescence, marquée par de "la violence" intrafamiliale, mais aussi des "soupçons, (...) sur des actes que mon père aurait commis sur mes sœurs". "Dans la famille, j’étais le bon à rien", à l'école, "c'était moyen", "c'était très compliqué" aussi dans la vie intime, et professionnelle, égrène-t-il.

Mais il n'exprime aucun regret, comme le pointe, à l'issue de l'audience, Me Sandrine Billard, qui représente deux victimes. "Il fallait que je sois là, que je le voie que je me confronte à lui (...) mais il ne laisse rien transparaître", regrette aussi Valérie, agressée en 1997. Une autre victime, Mélanie, agressée à 14 ans la même année, n'espère pas "la vérité", mais compte sur le procès pour se "reconstruire après". "J'ai cru longtemps qu'il était (...) en train de me surveiller et puis qu'il allait finir son travail parce qu'il m'avait dit qu'il me tuerait si je criais", se remémore-t-elle.

Dans la salle, trois psychologues étaient présents pour les victimes.

Des faits «tellement anciens»

L'enquête, tentaculaire, débute fin 1996 avec la plainte pour viol, le long d'une voie rapide à Maubeuge, d'une femme de 28 ans. D'autres agressions suivent, presque toujours à l'aube, en hiver, généralement sur la voie publique.

Avec le même mode opératoire : l'homme saisit ses victimes par derrière, les étrangle avec l'avant-bras ou un lien, les menace, souvent à l'aide d'un couteau. Plusieurs diront avoir "vu la mort". La police multiplie les investigations des années durant, compare les ADN, quadrille la zone, sans succès. Un premier non-lieu est prononcé en 2003. L'affaire rebondira en 2006 après des agressions en Belgique.

D'autres plaintes plus anciennes sont alors rapprochées du dossier, dessinant un terrain de chasse qui s'étend sur un rayon de moins de 30 km autour de la Sambre, qui traverse la frontière franco-belge. Mais le coupable demeure introuvable, jusqu'à l'agression d'une adolescente en février 2018 à Erquelinnes (Belgique). Cette fois, la vidéosurveillance capture une Peugeot 206. Son conducteur, Dino Scala, est arrêté quelques semaines plus tard à Pont-sur-Sambre, à la stupéfaction de son entourage.

Couteau, cordelettes, gants sont retrouvés lors des perquisitions. Son ADN est présent sur plusieurs scènes de crime. En garde à vue, il avouera une quarantaine d'agressions, mais en conteste "une quinzaine", selon son avocate. A la cour, qui a réservé sa décision, elle a demandé la prescription de certains faits "tellement anciens que plus personne ne sait exactement ce qui s’est passé".

"Pour les victimes, c'est gravé dans leurs mémoires, dans leur chair, leur âme", a réagi à l'issue de l'audience Me Caty Richard, qui défend trois femmes. Dino Scala veut se présenter comme "soulagé d'avoir été interpellé, victime de ses pulsions", mais "on se rend compte qu'on n'est pas du tout dans cet état d'esprit puisqu'il vient soutenir la prescription", a-t-elle fustigé.