Affaire Bétharram : un ancien surveillant visé par une information judiciaire pour viols et agressions sexuelles

Une information judiciaire a été ouverte pour viols et agressions sexuelles contre un ancien surveillant de l’établissement catholique Notre-Dame de Bétharram (Pyrénées-Atlantiques). Trois hommes avaient été placés en garde à vue, mais deux d’entre eux ont été relâchés en raison de la prescription des faits. Le parquet a requis le placement en détention provisoire du suspect visé par la procédure. L’enquête, qui porte sur des faits dénoncés par plus d’une centaine d’anciens élèves, se poursuit sous l’autorité d’un juge d’instruction.
Affaire Bétharram : un ancien surveillant visé par une information judiciaire pour viols et agressions sexuelles
Illustration. (Jose Hernandez/Camera 51/shutterstock)
Par Actu17
Le vendredi 21 février 2025 à 15:53

Une information judiciaire a été ouverte vendredi 21 février 2025 pour viols et agressions sexuelles contre un ancien surveillant de l’établissement catholique Notre-Dame de Bétharram (Pyrénées-Atlantiques), a annoncé le parquet de Pau. Ce dernier, né en 1965, est visé par cette procédure pour "viol par personne ayant autorité entre 1991 et 1994" ainsi que pour "agression sexuelle sur mineur de quinze ans en 2004". Le parquet a requis son placement en détention provisoire. L’homme, qui était encore en poste en 2024 avant d’être écarté à la suite de l’ouverture de l’enquête, est le seul des trois suspects placés en garde à vue cette semaine à être poursuivi.

L’enquête, menée depuis un an, porte sur des faits dénoncés par plus d’une centaine d’anciens élèves, s’étalant sur un demi-siècle. Trois hommes avaient été placés en garde à vue mercredi 19 février, nés respectivement en 1931, 1955 et 1965, pour des faits de "viols aggravés, agressions sexuelles aggravées et/ou violences aggravées" sur des enfants scolarisés dans l’institution béarnaise.

Les deux autres mis en cause, un ancien prêtre et un ancien surveillant, ont été relâchés jeudi 20 février, la totalité des faits qui leur étaient reprochés étant prescrits. "Pour ce qui est des gardés à vue nés en 1931 et 1955, ils étaient finalement laissés libres à l’issue des mesures au regard de la prescription de l’action publique s’appliquant à la totalité des faits qui leur étaient reprochés", a précisé le procureur de la République de Pau, Rodolphe Jarry. L’ancien prêtre était mis en cause pour des faits commis entre 1978 et 1989, tandis que l’ancien surveillant était accusé d’abus sur un élève entre 1957 et 1962.

Selon le magistrat, les faits dénoncés s’échelonnent entre 1955 et 2004 et concernent au total 11 personnes, dont huit sont aujourd’hui décédées. Les trois personnes toujours en vie sont celles placées en garde à vue cette semaine. Au 31 janvier, 112 lettres de dénonciation avaient été enregistrées dans le cadre de l’enquête. Parmi les nombreuses plaintes recensées par le collectif des victimes, une poignée n’est pas frappée par la prescription.

Des faits intégralement prescrits pour des anciens membres du personnel

Le collectif des victimes dénonce un "règne du silence" qui aurait permis aux agresseurs présumés d’agir en toute impunité. Son porte-parole, Alain Esquerre, lui-même ancien pensionnaire, évoque des violences répétées, allant des abus sexuels aux châtiments corporels et aux humiliations.

Par ailleurs, quatre anciens membres du personnel laïc de l’institution ont été entendus par les gendarmes de la section de recherches de Pau pour des "violences graves et répétées" commises entre 1979 et 1996. Trois d’entre eux ont reconnu les faits : deux ont admis avoir donné des gifles, tandis que le troisième a "concédé avoir également pu tirer les cheveux des enfants ou leur donner des coups avec le poing fermé", selon le parquet. Ces délits étant intégralement prescrits, ils ont été laissés libres.

Le parquet de Pau a annoncé qu’"une réunion d’information et d’échanges, non ouverte à la presse, sera très prochainement organisée à destination de l’ensemble des victimes du dossier considéré".

«L'État n’a pas été au rendez-vous de ce dossier» estime Élisabeth Borne

Cette affaire intervient en pleine tourmente politique, éclaboussant le Premier ministre François Bayrou, ancien maire de Pau et ministre de l’Éducation au moment de certains faits. Lors d’une séance à l’Assemblée nationale, il a affirmé n’être "jamais intervenu dans cette affaire, ni de près, ni de loin", tout en concédant que s’il "ne savait pas, d’autres savaient", en référence aux ministres en poste à l’époque. La polémique a éclaté après la publication de témoignages affirmant qu’il aurait été au courant de signalements dans les années 1990, ce qu’il dément formellement.

Invitée sur BFMTV ce vendredi matin, la ministre de l’Éducation nationale, Élisabeth Borne, a reconnu que "l’État n’a pas été au rendez-vous de ce dossier". Sur RMC, elle a ajouté qu’il était difficile de "comprendre pourquoi on n’a pas agi plus tôt", tout en réaffirmant la nécessité pour le gouvernement de poursuivre son action "pour que la parole se libère".

Les investigations se poursuivent sous l’autorité d’un juge d’instruction du tribunal judiciaire de Pau. "L’information judiciaire devra s’attacher non seulement à éclairer les circonstances de commission des faits précités, mais aussi à rechercher et à entendre d’éventuelles autres victimes non encore connues à ce jour", a précisé le procureur.