Le samedi 22 avril 2023 à 09:49
Un policier a été mis en examen pour "violences avec arme par personne dépositaire de l'autorité publique ayant entrainé une incapacité de travail supérieure à 8 jours" notamment, ce vendredi, à l'issue de sa garde à vue dans les locaux de l'inspection générale de la police nationale (IGPN). Il est soupçonné d'avoir percuté un scooter lors d'une course-poursuite à Paris, le 13 avril dernier. Un deux-roues sur lequel se trouvaient trois mineurs âgés de 17, 14 et 13 ans.
L'adolescente qui conduisait le scooter a refusé d'obtempérer aux forces de l'ordre à bord d'une voiture, et a accéléré. Cette dernière a été très grièvement blessée dans sa chute, les deux autres mineurs moins gravement.
L'avocat du policier qui était au volant, Me Laurent-Franck Lienard, que nous avons interrogé, dénonce une situation "très grave" et une inversion des valeurs. Il affirme notamment qu'il n'y avait aucune intention de la part de son client de percuter le scooter et de blesser les trois mineurs. "Nous avons des personnes qui sont à trois sur un scooter, dont l'une n'a pas de casque, et qui s'affranchissent de toutes les règles du droit. Nous avons des policiers qui tentent de les interpeller. Et au cours de cette opération, alors que la personne qui conduit le scooter refuse totalement d'obtempérer, il y a un contact entre les véhicules, il y a un accident", assure l'avocat. "Alors que dans toutes les sociétés, normalement constituées, on considérerait que la personne qui est responsable de cet accident, est celle qui conduisait le scooter ; en France, on a considéré que les policiers étaient responsables. On les présume coupables".
Le policier n'a «fait que son travail»
"On met en examen le conducteur de la voiture pour des violences volontaires, alors que, évidemment, jamais ce policier n'a voulu percuter ou toucher le scooter", s'insurge Me Laurent-Franck Lienard. "Il connaissait le danger représenté par la chute de ce deux-roues et il n'a évidemment pas voulu le toucher".
Le fonctionnaire concerné a par ailleurs reçu l'interdiction d'exercer sa profession et d'entrer en contact avec les victimes et les témoins. "Le pouvoir de la presse et le pouvoir de la justice aujourd'hui, c'est que ce policier est interdit d'exercice, interdit de port d'arme, alors qu'il n'a fait que son travail", poursuit celui qui défend les membres des forces de l'ordre devant la justice depuis près de trente ans. "Il a essayé de le faire dans des conditions compliquées, puisque quand la police essaye d'interpeller une personne, et que cette personne refuse de se laisser interpeller, évidemment les conditions d'exercice deviennent difficiles".
"On est vraiment en train de renverser les valeurs, on est en train de lire le livre à l'envers, au lieu de mettre la responsabilité sur celui qui la porte, on met la responsabilité sur celui qui essaie de faire tenir la société et de maintenir la cohésion sociale", déplore l'avocat.
Les deux autres policiers remis en liberté sans charge
Ce vendredi matin, le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin a annoncé la suspension des policiers impliqués dans cette enquête. "Je crois comprendre que les témoignages des policiers du premier jour ne sont pas ceux d'aujourd'hui et qu'ils reconnaissent des gestes qui ne sont pas appropriés", ajoutant : "J'ai demandé au préfet de police de suspendre (...) ceux qui seraient responsables, notamment une conductrice et d'autres policiers, de cette situation".
Un juge d'instruction a été nommé dans ce dossier et les investigations se poursuivent. Au terme de leur garde à vue, les deux autres policiers ont été remis en liberté sans charge à ce stade.
L'avocat des familles des trois adolescents blessés, Me Arié Alimi, a de son côté déposé une plainte pour "tentative d’assassinat par personne dépositaire de l’autorité publique, avec arme par destination, sur personnes mineures".