Violences urbaines : Les policiers en région parisienne sommés d'«éviter tout contact avec les perturbateurs»

Les policiers en région parisienne ont reçu des instructions les appelant notamment à "éviter tout contact avec les perturbateurs sur les interventions ne représentant pas de danger". Des consignes jugées incompréhensibles par les forces de l'ordre, très impactées et ciblées dans les violences urbaines depuis quatre nuits.
Violences urbaines : Les policiers en région parisienne sommés d'«éviter tout contact avec les perturbateurs»
Illustration. (Remy Buisine)
Par Actu17
Le mercredi 22 avril 2020 à 23:13 - MAJ mercredi 22 avril 2020 à 23:35

Les épisodes de violences urbaines se multiplient depuis samedi soir en région parisienne mais également dans d'autres régions de France. Des appels à l'émeute sont également diffusés sur les réseaux sociaux depuis 48 heures, avec parfois le nom de villes ou de quartiers.

Une situation qui a débuté ce samedi soir à Villeneuve-la-Garenne (Hauts-de-Seine) lorsqu'un homme circulant sur une moto non homologuée, qui n'avait pas de casque, a percuté une voiture de police, se fracturant une jambe. Des vidéos et messages ont été diffusés en nombre le soir même sur les réseaux sociaux, et évoquaient une "bavure policière" ou encore un acte délibéré des forces de l'ordre pour blesser cet homme de 30 ans, bien connu des services de police et de justice. Le hashtag "#mortauxporcs" a également été très utilisé et partagé, visant là encore les policiers.

Durant cette soirée de samedi, des internautes ont aussi diffusé la vidéo d'une rixe à La Courneuve (Seine-Saint-Denis) montrant un homme blessé, en expliquant qu'il avait été abattu par la police. Ce dernier avait en fait reçu un coup de couteau lors de cette bagarre opposant une dizaine de personnes.

Quatre nuits de violences urbaines

Pour la quatrième nuit de suite, les forces de l'ordre ont fait face à des violences urbaines, principalement en région parisienne. Les policiers ont été la cible de tirs de mortiers d'artifice ou de jets de projectiles, notamment à Aulnay-sous-Bois, à Saint-Denis, à Montreuil ou encore à Gennevilliers où une école primaire a été incendiée, à Villeneuve-la-Garenne, mais également dans les Yvelines. Les images montrant ces agressions ne manquent pas sur les réseaux sociaux.

"Devoir reculer face à des individus qui ne respectent rien, c'est surtout incompréhensible"

C'est dans ce contexte de tensions palpables que les forces de l'ordre d'Île-de-France ont reçu comme consignes ce mardi dans la soirée, de renoncer à certaines de leurs initiatives. Un message qui a été diffusé lors d'un appel général sur les ondes police, émis par les différentes salles de commandement de chaque département, selon plusieurs sources policières.

Le syndicat Unité SGP-FO a enregistré et diffusé l'un de ces messages dans une vidéo publiée ce mercredi, et déplore une notion de "deux poids / deux mesures" dans un tract.

"Suite aux phénomènes récents de violences urbaines sur l’ensemble de la région parisienne, une certaine prudence est à prendre en compte de la part des effectifs de voie publique", a demandé la salle de commandement des Yvelines aux policiers, ce mardi soir, sur les ondes police. "Il y a lieu d’éviter tout contact avec les perturbateurs sur les interventions ne représentant pas de danger ou de propagation d’incendie afin d’éviter d’avoir des fonctionnaires blessés. Il y a lieu de faire un usage raisonnable et raisonné de l’armement collectif".

Des consignes qui viennent de la préfecture de police, et qui passent mal dans les rangs des policiers de terrain. "Devoir reculer face à des individus qui ne respectent rien, c'est frustrant et surtout incompréhensible pour nous, les règles doivent être les mêmes pour tout le monde", réagit un fonctionnaire expérimenté, affecté dans un commissariat des Yvelines.

"On doit être présent partout mais n'intervenir nulle part"

La veille à Montreuil, des policiers ont reçu des instructions similaires raconte le syndicat Alliance police nationale de Seine-Saint-Denis dans un tract. Ces derniers passaient à proximité d'une manifestation interdite, "anti-police", en plein confinement, lorsqu'ils ont été pris à partie. "Victime d'un jet d’œuf sur leur véhicule, les policiers de Montreuil se sont vus quitter les lieux sur instruction du TK (commandant de police, ndlr) de TN 93 (la station directrice du département)".

 

"Nous n'arrivons pas à comprendre les instructions qui disent tout et son contraire", s'exclame Grégory Goupil, secrétaire départemental du syndicat Alliance. "On doit être présent partout mais n'intervenir nulle part !", ajoute-t-il.

Un nouvel épisode d'incompréhension dans la police nationale donc, durant cette crise sanitaire du coronavirus, qui fait suite à celui concernant les masques de protection respiratoire. A la mi-mars, les policiers avaient reçu des consignes mentionnant l'interdiction d'en porter.