Le mardi 4 octobre 2022 à 20:00
La défense de "l'escroc des stars" Christophe Rocancourt, de l'ex-patron du GIGN Christian Prouteau et de l'avocat Marcel Ceccaldi, a plaidé la relaxe mardi à Paris, adjurant le tribunal d'écarter la "construction fantasmatique" de l'accusation pour revenir aux "preuves".
Au seuil de ce procès complexe des fuites au 36 quai des Orfèvres, impliquant au total 19 prévenus, le parquet a, fait rare, requis lundi la relaxe dans le second volet du dossier, celui des soupçons d'entrave à la justice visant notamment l'ex-patron du "36", Bernard Petit.
Le ministère public a en revanche demandé des peines de prison ferme et d'amendes dans les deux autres volets de l'affaire, notamment le premier, celui des soupçons de trafic d'influence.
Dans ce pan du dossier, il est notamment reproché à Christophe Rocancourt et à Marcel Ceccaldi d'avoir sollicité Christian Prouteau et l'ancien secrétaire d’État Kofi Yamgnane, afin qu'ils interviennent, moyennant rémunération, dans les dossiers de régularisation de deux sœurs marocaines.
Une «escroquerie sans victime»
L'accusation a requis quatre ans d'emprisonnement, dont deux ferme, ainsi que 30 000 euros d'amende contre Christophe Rocancourt, connu pour avoir arnaqué, dans les années 1990, de riches Américains sous différentes identités. Une peine "choquante" pour son avocat, qui a demandé au tribunal de ne pas le juger "en fonction de sa légende".
Les 2500 euros évoqués dans les écoutes entre Christophe Rocancourt et Christian Prouteau correspondent au remboursement de l'achat avorté d'une montre, et non à un "pacte de corruption", a affirmé Me Jérôme Boursican.
Christophe Rocancourt est aussi soupçonné, entre autres, d'avoir fait croire à un notaire, Jean-Michel Vulach, qu'un policier - en réalité imaginaire - pouvait l'aider, en échange d'un pot-de-vin : une "escroquerie sans victime" puisque le notaire réfute avoir versé quoi que ce soit, a balayé l'avocat.
Dans les écoutes téléphoniques comme à la barre, Christophe Rocancourt "parle beaucoup, il se met beaucoup en scène, il dit beaucoup de choses et souvent n'importe quoi. Est-ce que cela fait une infraction pénale ? Je ne crois pas", a lancé son conseil. Assurant que le célèbre escroc s'est "réinséré", il a demandé sa relaxe, ou de façon subsidiaire, une peine modérée pour des "faits minables".
«Écran de fumée»
"Une montre, une maudite montre. Tout commence dans ce dossier pour Christian Prouteau et tout doit finir par cette montre", a débuté l'avocate de l'ex-gendarme de l’Élysée, contre qui deux ans de prison, dont un ferme, et 40 000 euros d'amende ont été requis.
Fustigeant "suppositions inouïes" et "écran de fumée", Me Caroline Toby a soutenu que M. Prouteau n'avait fait que toucher le "remboursement" de l'argent avancé pour une montre Breguet, qu'il devait acheter à M. Rocancourt mais n'a jamais reçue.
En aucun cas il ne s'agissait d'une rémunération de son intervention pour les sœurs marocaines, que cet "homme de bien" a effectivement réalisée mais "gratuitement", pour "rendre service", a affirmé l'avocate, invoquant la "chronologie" et les déclarations "concordantes" des protagonistes.
A l'encontre de Marcel Ceccaldi, le parquet a requis trois ans d'emprisonnement dont deux ferme, 50 000 euros d'amende et une interdiction définitive d'exercer. "Des réquisitions astronomiques", a fustigé son conseil Me Thierry Herzog, rappelant que l'avocat, à 76 ans, avait 51 ans de barre et un casier vierge.
"Celui que je défends a agi en toute transparence", a plaidé Me Herzog, faisant valoir que la remise de 3000 euros à Kofi Yamgnane par l'une des sœurs marocaines visait en réalité au financement d'une future campagne de l'homme politique.
Me Ceccaldi est aussi soupçonné d'avoir reçu 5000 euros sur l'argent versé par le notaire Jean-Michel Vulach : cette somme n'a "jamais été retrouvée" et Christophe Rocancourt, qui a un temps déclaré avoir versé cet argent, s'est dédit à la barre, a soutenu l'avocat.
Aucune preuve non plus selon Me Herzog concernant sa supposée relation d'affaires avec le célèbre escroc : les 90 000 euros promis dans une écoute téléphonique n'ont pas été transférés et les deux clients apportés par M. Rocancourt ne se sont jamais plaints d'avoir été "surfacturés".
"Je vous demande de le relaxer purement et simplement", a conclu Me Herzog. Les plaidoiries se poursuivent mercredi.