Le lundi 10 février 2025 à 22:06
Un policier a été condamné au civil à verser 1000 euros de dommages et intérêts à une femme dont il traitait la plainte pour agression sexuelle et qu’il avait qualifiée de "grosse pute" dans un message vocal laissé par erreur. La cour d’appel de Paris a rendu cette décision le 30 janvier dernier, considérant qu’il s’agissait d’une "injure non publique à raison du sexe envers la plaignante", comme rapporté par Mediapart.
Les faits remontent à la nuit du 4 au 5 février 2022. Une femme de 34 ans s’était rendue au commissariat des 5e et 6e arrondissements de Paris pour déposer plainte pour "agression sexuelle en état d’ivresse". Un policier du commissariat l’avait ensuite contactée par téléphone pour lui demander de venir compléter sa plainte.
Mais après avoir laissé son message, croyant avoir raccroché, il avait poursuivi la conversation avec une collègue. On l’entendait alors déclarer : "Je la rappellerai de toute façon parce que, là, elle doit être en train de cuver". Puis, après avoir lu un extrait de la plainte à haute voix, il ajoutait : "C’est vraiment une pute. (…) Putain, elle refuse la confront’ en plus, la pute. Comme par hasard. En fait, c’était juste pour lui casser les couilles, je suis sûr. (…) Putain, grosse pute".
Une relaxe au pénal mais une condamnation au civil
Le policier, âgé de 33 ans, avait été poursuivi devant le tribunal de police de Paris pour ces propos. En janvier 2024, il avait été relaxé en première instance, la juridiction estimant que ces injures ne constituaient pas une "injure non publique en raison du sexe". Cette décision est devenue définitive, le parquet n’ayant pas fait appel.
La plaignante a néanmoins contesté cette issue en portant l’affaire sur le terrain civil. La cour d’appel de Paris lui a donné raison en reconnaissant une faute du fonctionnaire et en condamnant ce dernier à lui verser des dommages et intérêts. Dans son arrêt, elle a estimé qu’"il n’est pas contestable que le terme 'la pute', répété plusieurs fois, est injurieux et visait, au vu du contexte, [la plaignante], en raison de son sexe".
Une sanction professionnelle mais pas de révocation
Cette affaire a suscité une vive polémique sur la manière dont les forces de l’ordre traitent les plaintes pour violences sexuelles. À l’époque, Gérald Darmanin, alors ministre de l’Intérieur, avait jugé que le policier n’avait "plus sa place" dans la police. "Ce policier a sali non seulement toutes les femmes qui essaient de déposer plainte (…), mais il a sali, il a craché sur l’uniforme de la République de ses 250 000 autres collègues policiers et gendarmes", avait-il déclaré, précisant néanmoins qu’il ne pouvait décider seul d’une révocation.
Suspendu pendant plus de quatre mois, le fonctionnaire a finalement été sanctionné d’une mutation professionnelle. En juin 2023, une interdiction de contact avec les victimes et les mis en cause pour agression sexuelle lui a été imposée.
Lors des audiences, tant en première instance qu’en appel, le policier a présenté ses excuses. Il a assuré que ses propos traduisaient uniquement son agacement face à des "irrégularités procédurales".