Le mercredi 1 juin 2022 à 22:34
A son procès à Paris pour le tabassage d'un ancien ami en 2015, le militant d'ultradroite Loïk Le Priol, mis en cause en mars dernier dans le meurtre du rugbyman argentin Federico Martin Aramburu, a cherché à faire profil bas, reconnaissant les coups mais niant la préméditation. "Rien de tout ça n'était prévu, ça a complètement dérapé", a-t-il affirmé devant le tribunal correctionnel.
Aujourd'hui âgé de 27 ans, Loïk Le Priol est jugé avec quatre autres personnes pour des "violences aggravées" commises en réunion, sous la menace d'une arme et avec préméditation à l'encontre d'Edouard K., qui dirigeait le groupuscule d'extrême droite Gud entre 2010 et 2012. Mains jointes devant lui, tête souvent baissée, il a répondu d'une voix calme depuis le box aux questions du tribunal.
12 jours d'ITT
Assurant "regrette(r) tout ce qui s'est passé", il a livré son récit de la soirée du 8 octobre 2015, mettant en cause "une forte alcoolémie" et l'"effet de groupe" pour expliquer le déchaînement de violence et d'humiliation qui a valu à Edouard K. douze jours d'incapacité totale de travail pour ses blessures physiques et trente jours pour le "retentissement psychologique".
Selon l'enquête, le jeune homme a "reçu de nombreux coups de pieds et de poing, a été menacé à l'aide d'un couteau, puis a été contraint de se déshabiller entièrement" et de danser, pendant que Loïk Le Priol filmait la scène. L'ex-commando marine, rapatrié d'une mission dans les forces spéciales en juillet 2015 pour stress post-traumatique, a expliqué qu'il se trouvait ce jour d'octobre 2015 à une fête au domicile d'Edouard K., "un ami" qui "a été très longtemps le leader de nous tous", et qu'il n'avait pas vu depuis longtemps.
«La guerre continue à l'intérieur»
Il reconnaît avoir appelé ses amis pour qu'ils le rejoignent, mais assure qu'ils voulaient seulement avoir une "explication" avec Edouard K, qui aurait tenu des propos désinvoltes, justifiant des violences passées envers deux ex-copines, amies de Loïk Le Priol. L'une d'elles, venue témoigner à la barre, assure que son "compagnon" de l'époque lui a asséné "une très grosse gifle" en juillet 2012.
Un autre prévenu, Romain Bouvier, également mis en examen et incarcéré pour le meurtre de l'ex-international de rugby argentin Federico Martin Aramburu, a ajouté qu'Edouard K. se serait réjoui d'un grave accident de la route subi quelques semaines plus tôt par lui, Loïk Le Priol et "une amie d'enfance", alors dans le coma. "Je lui en voulais terriblement", a-t-il reconnu, ajoutant qu'à l'époque, suite à l'accident, il consommait "de l’alcool plus que de raison" et se trouvait "dans un état psychologique déplorable".
Loïk Le Priol, qui se trouvait au volant lors de l'accident, sera condamné à un an de prison avec sursis en janvier 2017 pour "violences involontaires". "Toute cette période de retour de mission est assez compliquée pour moi", s'est remémoré l'ancien militaire d'élite. Une fois rentré en France, "cette guerre elle continue. Elle continue à l’intérieur de vous", a-t-il expliqué. "Cela n’excuse en rien tout ce qui a pu être fait sur M. Klein, mais je savais que je n’étais pas moi-même".
Évoquant son acceptation de la pathologie, après une période de "déni", et son suivi psychologique, il a affirmé avoir "eu une évolution énorme depuis" les faits. Une affirmation qui fait réagir dans la salle d'audience, au vu de la mise en examen du jeune homme le 1er avril pour "assassinat", après la mort de l'ex-international de rugby Federico Martin Aramburu, suite à une altercation à Paris. "Vous êtes présumé innocent et je ne poserai aucune question à ce sujet", a souligné Léon-Lef Forster, avocat d'Edouard K.
Il a en revanche repoussé le tableau dressé selon lui par les prévenus à l'audience : "Le méchant c’était lui, et il n’aurait subi que ce qu’il aurait mérité". Il a contesté le motif de la défense d'amies maltraitées, ajoutant que "même si c’était vrai, ça ne justifie par un tabassage en règle". Selon lui, la raison de l'agression serait plutôt la "blessure narcissique" d'un des prévenus, Logan Djian, qu'Edouard K. aurait traité de "balance" pour l'avoir mis en cause dans une autre enquête.