Le samedi 2 avril 2022 à 19:30 - MAJ samedi 2 avril 2022 à 21:28
Après Nicolas Dupont-Aignan hier, notre troisième interview ce samedi est celle du candidat de "Reconquête!", Éric Zemmour.
Actu17 : Quel bilan faites-vous du quinquennat écoulé en matière de sécurité ?
Éric Zemmour : Ce bilan est catastrophique. Emmanuel Macron, tout comme ses prédécesseurs depuis des décennies, a bradé la sécurité des Français. Depuis 30 ans, l’État perd chaque jour un peu plus son autorité et la violence est de plus en plus répandue dans la vie quotidienne. Rendez-vous compte que, chaque jour, on dénombre 1800 agressions dont 120 attaques au couteau. Règlements de compte, homicides, prises d’otages, séquestrations, vols à main armée : tous les indicateurs sont dans le rouge et ces méfaits ne cessent de croitre depuis 2017. Durant le quinquennat d’Emmanuel Macron rien n’a été fait pour réduire les zones de non-droit où les caïds de la drogue font la loi. Je ne peux me résigner à accepter cette situation. Je veux des rues pacifiées, des centres-villes où les jeunes femmes peuvent circuler librement et des quartiers où règne l’ordre.
Les policiers et gendarmes se disent entravés au quotidien par des lourdeurs procédurales et par le poids de missions non cœur de métier. Que proposez-vous pour que leur action de tous les jours se concentre effectivement sur les missions de sécurité à proprement parler ?
Je ne cesse de dénoncer cette dérive depuis des années. Les lourdeurs administratives ont pris, au cours des dernières années, des proportions inédites. Toutes ces actions administratives chronophages réduisent le temps consacré sur le terrain. L’accumulation des réformes, notamment issues du droit européen, est à l’origine d’une complexification du code de procédure pénale. J’ai donc prévu plusieurs mesures concrètes de simplification procédurale du travail des policiers dans la lignée de la tradition inquisitoire française.
Par exemple, je limiterai les nullités de procédure aux seules remises en cause sur le fond, car aujourd’hui, trop de procédures entières tombent devant les juges pour des signatures oubliées. Je m’opposerai également au mouvement continu d’extension de l’immixtion des avocats dans les procédures. Cette immixtion continue à prendre de l’ampleur et la présence des avocats lors des perquisitions a été discutée par la gouvernement. Je m’engage à mettre fin à cette extension. Dernier exemple, et cela changerait en profondeur la vie des enquêteurs, je m’engage à faire converger les cadres d’enquête pour aboutir à un alignement le plus possible sur le cadre de l’enquête de flagrance.
Une note de la Cour des comptes de novembre 2021 révèle que le taux d’élucidation des homicides, des violences volontaires et des cambriolages a baissé. Le grand judiciaire comme le petit judiciaire vont mal. La filière n’attire plus. Quelles sont vos propositions pour revaloriser cette filière tant en police qu’en gendarmerie ?
Je suis le seul à avoir dénoncé la faillite annoncée de la filière judiciaire au cours de cette campagne. Aucun autre candidat ne l’a abordée. Pendant longtemps, la filière judiciaire était le Graal du jeune policier, elle attirait souvent les meilleurs profils. Mais depuis les années 1990 et surtout les années 2000, cette filière judiciaire connait d’immenses difficultés de recrutement.
Comme je l’ai dit plus haut, je pense qu’une partie importante du désamour entre les policiers et la filière d’enquête vient de l’alourdissement perpétuel de la procédure. Alors que les enquêteurs étaient des profils très libres et très investis au service de la vérité, ils sont aujourd’hui enchevêtrés dans des dizaines de procédures à ne plus rien comprendre. A ce sujet, la réforme de la loi Guigou du 15 juin 2000 est emblématique. Cette loi ainsi que bien d’autres ont sans cesse cherché à protéger les droits de la défense au mépris de l’enquête, en sous-entendant que la police cherchait à faire condamner les accusés et ne cherchait pas à découvrir la vérité. C’est une véritable révolution qui s’est jouée à cette époque et dont les résultats se font sentir aujourd’hui. Les mesures de simplification de la procédure policière que j’ai évoquées plus haut sont donc urgentes et j’en ferai une priorité de mon quinquennat.
Le nombre de suicides dans les rangs de la Police et de la Gendarmerie sont en recrudescence en ce début d’année 2022. Quelles sont vos propositions concrètes pour endiguer ce fléau ?
Je pense que les propositions exposées précédemment répondent en grande partie à cette question. Près d’un policier sur quatre indique avoir déjà eu des pensées suicidaires. Nous en sommes, en cette fin du mois de mars, à déjà vingt-et-un suicides depuis le début de l’année 2022. Il y a, comme dans toute profession, des suicides liés à des difficultés personnelles, sur lesquelles l’institution policière a peu de prise. En revanche, la police connait également une problématique spécifique liée à la difficulté du métier.
Je pense notamment que beaucoup de policiers ont perdu le sens de leur métier. Emmanuel Macron, à ce sujet, a fait beaucoup de mal en jetant l’opprobre sur tous les policiers lorsqu’il a évoqué les violences policières. Tant que la profession n’aura pas été revalorisée, que les policiers et gendarmes subiront toujours des violences urbaines en se faisant quotidiennement insulter, qu’ils devront toujours rentrer dans certains quartiers avec la peur de se faire caillasser ou de recevoir des cocktails Molotov sans pouvoir réagir, rien ne changera vraiment. Nombre d’entre eux souhaitent simplement rétablir l’ordre et permettre à leur nation de pouvoir retrouver la paix et la tranquillité. La frustration et le sentiment d’impuissance s’accumulent.
Je veux redonner aux policiers le sens de leur métier qui est un des plus beaux métiers du monde. Pour cela, il faut une hiérarchie à 100% derrière sa police, dans les paroles mais surtout dans les actes. Il faut également une Justice à la hauteur, ce qui est très loin d’être le cas aujourd’hui. Avec moi, cela changera.
La loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur a été présentée en conseil des ministres du 16 mars. Si vous êtes élu président de la République, changerez-vous ce texte ? Si oui en quoi ?
Je tiens à préciser qu’Emmanuel Macron prévoyait cette loi dans son programme de 2017. Il ne l’a jamais mise en place.
Ceci étant dit, je suis favorable à une loi de programmation pour la police, mais également d’ailleurs pour la Justice. Car ces institutions régaliennes doivent pouvoir prévoir à long terme leur évolution. Je constate que, dans le texte d’Emmanuel Macron, rien ou presque concernant la lutte contre le trafic de drogue, aucune mesure concrète et efficace n’est proposée pour récupérer les zones de non-droit. Aucune réforme de la Justice n’est envisagée, aucune simplification concrète de la procédure pénale n’est envisagée, aucun programme de construction de prisons n’est prévu, alors qu’Emmanuel Macron est très en retard sur ce sujet. Rien non plus n’est prévu pour enfin considérer les polices municipales comme la troisième force de sécurité. Aucun changement juridique ne sera apporté pour protéger les policiers en cas d’usage de leur arme à feu. En bref, qu’est-ce qui changera ? Rien ou presque.
Je ne dis pas que tout est à jeter dans ce projet de loi, mais il faut absolument appliquer en priorité des mesures drastiques et impitoyables pour enrayer et réduire la délinquance. Toutes ces mesures, je les prévois dans mon programme.
Comment imaginez-vous la police et la gendarmerie de demain ?
Je veux que la police et la gendarmerie de demain soient respectées, que la peur change de camp, que les membres des forces de l’ordre soient enfin à même de réaliser convenablement leurs missions sans être ralentis par une trop lourde bureaucratie et une gestion administrative chronophage.
Avec mes mesures, je vous l’annonce, la totalité des délinquants et des criminels de ce pays seront, soit expulsés, soit en prison. Le travail des policiers et des gendarmes sera moins dangereux, plus sûr et la plupart d’entre eux n’auront plus la peur au ventre en prenant leur service. Avec cette baisse de la délinquance du quotidien ou du crime organisé, nous pourrons renforcer la lutte par exemple contre les violences intrafamiliales, nous pourrons avoir une filière d’enquête de haut niveau plutôt que d’être perpétuellement obligés de patrouiller dans les quartiers dits sensibles et de perdre de l’énergie inutilement. Je vois les policiers et les gendarmes comme le premier pilier sur lequel la tranquillité et la sécurité des Français reposera.