Cambriolage du Louvre : les deux suspects ont «partiellement reconnu» les faits, les bijoux restent «introuvables»

Laure Beccuau, la procureure de la République de Paris, a fait le point sur l’enquête ouverte après le cambriolage spectaculaire du Louvre, survenu le 19 octobre 2025. Deux suspects interpellés le week-end dernier ont été déférés ce jeudi. Ils ont été mis en examen pour vols en bande organisée avant d'être placés en détention provisoire. Les huit bijoux de la Couronne, d'une valeur de 88 millions d'euros, restent introuvables.
Cambriolage du Louvre : les deux suspects ont «partiellement reconnu» les faits, les bijoux restent «introuvables»
Le Louvre à Paris. (Illustration / Esmael81 / Shutterstock)
Par La Rédaction
Le mercredi 29 octobre 2025 à 21:54

La procureure de la République de Paris, Laure Beccuau, a tenu ce mercredi 29 octobre une conférence de presse au tribunal judiciaire de Paris, en présence de représentants de la Brigade de répression du banditisme (BRB) et de l'Office central de lutte contre le trafic des biens culturels (OCBC). La magistrate a souligné que "l'enquête sur le cambriolage du Louvre a suscité un considérable émoi". Deux hommes de 34 et 39 ans interpellés samedi 25 octobre au soir ont été présentés ce jeudi soir devant les magistrats instructeurs. Ils ont été mis en examen pour vols en bande organisée et association de malfaiteurs, puis ont été placés en détention provisoire, conformément aux réquisitions du parquet.

Le premier suspect, âgé de 34 ans et de nationalité algérienne, a été arrêté à 20 heures à l'aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle, "alors qu'il s'apprêtait à se rendre en Algérie sans billet de retour pour la France". Le second, âgé de 39 ans, a été interpellé à 20h40 à proximité de son domicile à Aubervilliers (Seine-Saint-Denis). À propos de ce dernier, Laure Beccuau a précisé que "rien ne permet d'affirmer qu'il était en partance pour l'étranger, contrairement à ce que certains médias ont diffusé".

La procureure a indiqué que "ces deux hommes sont soupçonnés d'être ceux qui ont pénétré dans la galerie d'Apollon pour s'emparer des bijoux" et "ils ont partiellement reconnu leur participation aux faits devant les enquêteurs". Le premier a été identifié grâce à des traces génétiques. "Il a été ciblé grâce aux traces ADN retrouvées sur un des scooters ayant servi aux malfaiteurs", a détaillé la magistrate. Le second a vu son ADN relevé sur une vitrine fracturée ainsi que sur des objets abandonnés.

Déjà connus des services de police

Le premier homme vit en France depuis 2010, à Aubervilliers. Il est connu des services pour des faits de délinquance routière et a déjà été condamné pour un vol. Le second, né et résidant à Aubervilliers, déclare exercer clandestinement l'activité de chauffeur de taxi, après avoir travaillé comme livreur. Il est connu pour des vols aggravés (2008 et 2014) et se trouve sous contrôle judiciaire dans une autre procédure de vol aggravé, qui doit être jugée en novembre au tribunal correctionnel de Bobigny.

Le dimanche 19 octobre, vers 09h30, un camion-élévateur a été positionné au pied du musée, quai François-Mitterrand. L'enquête a établi que ce camion-nacelle avait été volé le 10 octobre dernier à Louvres dans le Val-d'Oise : la victime, sollicitée pour un déménagement, a été maintenue sur place par deux hommes qui se sont emparés des clés et du véhicule.

Deux des malfaiteurs, visages masqués et vêtus de gilets jaunes, se sont hissés dans la nacelle jusqu'à la galerie d'Apollon, pendant que deux complices manœuvraient au sol. Ils ont brisé une fenêtre puis fracturé des vitrines à l'aide de disqueuses, s'emparant de huit joyaux de la Couronne. Des traces d'essence et un jerrican laissent penser qu'ils ont tenté de mettre le feu à la nacelle avant d'être interrompus par l'arrivée du service de surveillance du musée et celle des services de police. La fuite s'est faite sur deux scooters de type Yamaha TMax, par les quais de Seine, vers l'est parisien, où un point de rencontre a permis un changement de véhicules. Le cambriolage a duré moins de huit minutes, l'exploitation des vidéosurveillances permettant de retracer un changement de véhicules avant et après l'opération.

Sur l'éventuelle aide interne, la procureure a affirmé que "rien ne permet à ce stade d'affirmer que les malfaiteurs auraient bénéficié d'une complicité quelconque au sein du musée". Elle a toutefois précisé : "Nous n'excluons pas la possibilité d'un niveau plus large avec un commanditaire, voire les personnes susceptibles d'être destinataires".

Butin, objets retrouvés et restauration

Le butin est évalué à 88 millions d'euros. Parmi les pièces dérobées figure notamment le collier de la parure de saphirs de la reine Marie-Amélie et de la reine Hortense. Dans leur fuite, les cambrioleurs ont laissé tomber un neuvième bijou, une couronne de l'impératrice Eugénie, sertie de 1354 diamants, 113 roses et 56 émeraudes, retrouvée par les enquêteurs mais abîmée. Selon la présidente du Louvre Laurence des Cars, sa restauration "sera délicate".

À ce stade, aucun bijou n'a été retrouvé. Laure Beccuau a déclaré que "les bijoux ne sont, à l'heure où je vous parle, pas encore en notre possession", ajoutant qu'elle souhaite "garder l'espoir qu'ils seront retrouvés et pourront être rendus au Musée du Louvre, et plus largement à la nation". Elle a également rappelé que "ces joyaux sont dorénavant bien évidemment invendables" et averti que "quiconque les achèterait se rendrait coupable à son tour de recel de ce crime".

Une centaine d'enquêteurs

L'enquête, confiée à la BRB et à l'OCBC, mobilise environ une centaine d'enquêteurs. Plus de 150 prélèvements de traces ADN, papillaires et autres ont été réalisés, et 189 scellés ont été constitués. L'analyse de la vidéosurveillance a confirmé la participation d'au moins quatre malfaiteurs. Sur la conduite de l'investigation, la procureure a indiqué que "sept jours sur sept, les magistrats ont pu délivrer ou obtenir toutes les autorisations nécessaires" et a tenu à "saluer l'engagement exceptionnel de l'ensemble des services placés sous l'autorité de la BRB et de l'OCBC".

Deux complices sont encore recherchés. Pour la suite des investigations, Laure Beccuau a rappelé que "l'émoi et la curiosité de chacun se comprennent. Toutefois, la suite des investigations nécessite, pour être menée de façon efficace, la plus grande sérénité et la plus grande discrétion".

Sur la sécurisation du site, la présidente du Louvre Laurence des Cars a sollicité l'installation d'un commissariat au sein du musée. Le préfet de police de Paris, Patrice Faure, s'y est déclaré fermement opposé, une position également partagée par le ministre de l'Intérieur Laurent Nuñez.