«L'horreur est inimaginable» : au procès de Jean-Marc Reiser, la famille détruite de Sophie Le Tan

La famille de Sophie Le Tan, une étudiante tuée en 2018, le jour de ses 20 ans, et dont le corps a été retrouvé démembré en forêt, s'est exprimée ce mercredi matin lors du troisième jour du procès de Jean-Marc Reiser.
«L'horreur est inimaginable» : au procès de Jean-Marc Reiser, la famille détruite de Sophie Le Tan
L'avocat de la famille Me Gérard Welzer (d) et la mère de Sophie Le Tan, Thui Hong Le Tan (g), au procès de Jean-Marc Reiser, assassin présumé de sa fille, le 27 juin 2022 à Strasbourg. (AFP/Archives)
Par Actu17 avec AFP
Le mercredi 29 juin 2022 à 14:25

Une jeune fille "rayon de soleil", dont la mort est une "horreur au quotidien" : la famille détruite de Sophie Le Tan, tuée et démembrée le jour de ses 20 ans, a livré mercredi son calvaire devant la cour d'assises du Bas-Rhin face à un assassin présumé, Jean-Marc Reiser, au regard baissé.

"J'aimais beaucoup ma fille. Je voudrais qu'elle revienne, mais comment ?", a lancé d'une voix étouffée Thi Huong Le Tan, 50 ans, la mère de Sophie, dont les propos en vietnamien étaient traduits par une interprète. Au premier jour du procès lundi, cette femme discrète s'était effondrée, frôlant l'évanouissement à l'instant où Jean-Marc Reiser était entré dans le box des accusés. Elle avait été évacuée par des secouristes avant même le début de l'audience.

"C'était Sophie la personne principale de la famille, maintenant elle n'est plus là", a lâché Mme Le Tan, phrases entrecoupées de sanglots. "Je n'ai plus d'avenir, comme la famille", a poursuivi Mme Le Tan, qui se souvient que, pour les 20 ans de Sophie, "on voulait un grand anniversaire".

Sa fille a disparu le 7 septembre 2018, le jour même où elle devait souffler ses 20 bougies. Etudiante à Strasbourg, Sophie Le Tan allait visiter un appartement au nord de la ville, elle ne donnera plus signe de vie. Son corps démembré a été retrouvé en forêt en octobre 2019. Au bout de plusieurs minutes d'un témoignage douloureux, la mère de Sophie finit par lâcher prise : "J'ai trop mal, je veux arrêter".

«Horreur au quotidien»

L'un des avocats de la défense, Me Francis Metzger, se lève alors : "Madame, nous nous inclinons devant votre douleur". Derrière lui, visage baissé dans son box, Jean-Marc Reiser, d'habitude impassible, ôte son masque brièvement et s'essuie les yeux.

"La famille n'a pas encore reçu le pardon de l'assassin de leur fille", a lancé son père, Tri Le Tan, s'exprimant également en vietnamien. "Sophie n'est plus là, pour la famille c'est comme un phœnix qui a perdu une aile, blessé et pour toujours". "L'horreur est inimaginable, comme un petit feu qui brûle tout doucement et tous les jours et ça ne s'arrête pas", a-t-il poursuivi.

Cousine de Sophie, "un rayon de soleil", Nadine a également expliqué que tous les membres de la famille sont "habités par cette horreur au quotidien". Sans détourner le regard vers l'accusé, l'urbaniste strasbourgeoise a souligné que Jean-Marc Reiser, déjà condamné pour viols et acquitté faute de preuves dans une autre disparition, était "un récidiviste". "Tout ce malheur aurait pu être évité s'il n'avait pas été libéré".

Sophie Le Tan, dont le père ouvrier est arrivé du Vietnam en France en 1988, a grandi à côté de Mulhouse dans une famille très soudée avant de faire ses études d'économie et de gestion à Strasbourg. Pour éviter d'être une charge pour ses parents, elle avait un job de réceptionniste dans un hôtel.

«Rôle clé dans la famille»

Parlant français, vietnamien, allemand et anglais, la jeune femme était souvent l'interprète de ses parents et les aidait pour toutes les démarches administratives. "Elle avait un rôle-clé dans la famille", a expliqué son frère aîné Philippe, 24 ans. C'est elle "qui me faisait avancer". Le garçon, à l'allure renfermée, lui avait envoyé un message le 7 septembre avant d'aller en cours : "Joyeux anniversaire !".

Ses proches l'ont décrite, à une experte mandatée par la juge d'instruction, comme bien dans sa peau, amie fidèle, fille indépendante et responsable, sœur attentionnée. Elle était aussi méfiante à l'égard des gens qu'elle ne connaissait pas. "Sophie était quelqu'un de génial, elle apportait beaucoup de bien à son entourage", a confirmé à la barre Sylvie, sa sœur cadette.

Depuis sa mort, "c'est plus pareil, ça a vraiment changé, il n'y a plus de joie, pas de moyen d'être heureux", souffle celle qui n'avait pas encore trouvé la force de se présenter au tribunal judiciaire de Strasbourg depuis le début du procès lundi. Parmi sa famille, ses amis, ses professeurs ou employeurs interrogés lors de l'enquête, aucun ne dira un mot négatif sur Sophie Le Tan. "Non, je confirme", a répondu l'experte.