Le samedi 17 mai 2025 à 20:59
Le policier mis en examen après avoir mortellement blessé par balle une jeune femme lors d’une intervention pour un refus d’obtempérer à Paris, dans le XVIIIe arrondissement, en juin 2022, a bénéficié d’un non-lieu, a-t-on appris de source proche du dossier, confirmant une information du Parisien.
Selon l’ordonnance rendue le 5 mai 2025, les juges d’instruction ont estimé que les tirs des fonctionnaires de police "étaient absolument nécessaires et strictement proportionnés au regard de la situation créée" par le conducteur, "du fait de ses multiples refus d'obtempérer, de sa détermination à se soustraire aux contrôles, du danger objectif qu'il représentait pour les autres usagers de la route (...) et de la menace légitimement perçue par les fonctionnaires de police pour leur vie".
Les faits se sont produits le 4 juin 2022 aux alentours de 10h45. Trois policiers à VTT avaient tenté de contrôler une Peugeot 207, dont les passagers arrière ne portaient pas leur ceinture de sécurité. Le conducteur n’avait pas obtempéré et avait poursuivi sa route à vive allure sur environ 300 mètres jusqu’au boulevard Barbès. Coincée dans les embouteillages, la voiture avait tenté de redémarrer alors que les policiers étaient positionnés autour. Ces derniers avaient fait usage de leur arme à feu : cinq tirs pour l’un, trois pour un autre, un dernier tir pour le troisième.
L'un des policiers avait été mis en examen
Rayana, la passagère avant, avait été atteinte mortellement à la tête. Le conducteur avait également été blessé au thorax. Un seul policier, né en 1990 et sans antécédents judiciaires, avait été mis en examen en 2023 pour violences volontaires par personne dépositaire de l’autorité publique ayant entraîné la mort sans intention de la donner. Les deux autres agents avaient été placés sous le statut de témoin assisté.
Lors de l’information judiciaire, le policier mis en cause avait déclaré avoir "concentré ses tirs en direction du conducteur", estimant avoir craint pour sa vie et celle de sa collègue au moment où la voiture avait redémarré. Cette version a été contestée par les passagers arrière du véhicule, affirmant que les policiers n’étaient pas en danger lorsqu’ils avaient tiré.
«La famille de Rayana est sidérée»
Plusieurs parties civiles ont annoncé avoir interjeté appel de ce non-lieu. Me Florian Lastelle, avocat de la famille de Rayana, a réagi auprès de l'AFP en indiquant que "la famille de Rayana est sidérée et se sent profondément méprisée par les termes approximatifs de cette décision dont la motivation est particulièrement lacunaire et mince". Me Marie Violleau, avocate de la passagère arrière, a ajouté que "selon que vous soyez puissant ou misérable, les jugements de cour vous rendront blanc ou noir. Cette triste morale d’une fable de La Fontaine est incarnée par cette décision de non-lieu. La suprématie des syndicats est ici plus forte que le droit".
Me Raphaël Kempf, avocat du conducteur, a pour sa part estimé que "la loi de 2017 modifiant les conditions d’usage des armes par les policiers leur a laissé penser qu’ils pouvaient tirer aisément". Il a poursuivi : "Nous en mesurerons ici les terribles conséquences. Ce non-lieu alors que notre client est victime d'une tentative de meurtre est un très mauvais signal envoyé à ceux qui dans notre pays peuvent être la cible des violences, parfois meurtrières, de la police".
Selon une source proche du dossier, le conducteur doit être prochainement jugé par le tribunal correctionnel de Paris pour violences sur personnes dépositaires de l’autorité publique.