Le mardi 24 mars 2020 à 12:18
Jean-Jacques Razafindranazy, 67 ans, était médecin urgentiste à Compiègne (Oise). Il est le premier médecin à être décédé en France après avoir été contaminé par le coronavirus. Son décès a été annoncé par le ministre de la Santé Olivier Véran ce dimanche lors d'une conférence de presse. Depuis, quatre autres médecins sont décédés, dont trois généralistes.
L'annonce du décès de Jean-Jacques Razafindranazy a été un choc à l'hôpital de Compiègne où il travaillait. L'établissement a été le premier, avec celui de Creil, à accueillir des patients infectés par le Covid-19, en février dernier. "C’est très préoccupant car ce collègue n’avait, à notre connaissance, pas de problème de santé particulier", explique un délégué hospitalier de Compiègne interrogé par Le Monde ce lundi.
"J’ai le sentiment d’avoir été envoyée au casse-pipe"
Depuis le début de cette crise sanitaire, de nombreux soignants s'insurgent contre le manque d'équipements de protection, notamment de masques et de gels hydroalcooliques. Ces derniers sont nombreux à être contraints d'utiliser des masques chirurgicaux dont le niveau de protection est très limité. "Nous sommes pour la plupart à court de gel hydroalcoolique, nous utilisons des masques FFP2 périmés, et nos pharmacies n’ont toujours rien reçu. J’ai le sentiment d’avoir été envoyée au casse-pipe", peste une médecin généraliste du Val-d'Oise interrogée par le quotidien.
Jean-Paul Hamon, président de la Fédération des médecins de France évoque pour sa part une "médecine de catastrophe" et prévient que l’administration "devra rendre des comptes". Les stocks de masques en France ont fondu ces dernières années après une décision prise par le gouvernement de l'époque, en 2013. Olivier Véran a annoncé que la France avait commandé « 250 millions de masques » qui seront livrés « progressivement ». Du côté des soignants, il y a urgence.
Des centaines de soignants contaminés par le Covid-19
Jérôme Salomon, le directeur général de la Santé, a expliqué qu'il n'y avait pas de chiffre officiel concernant les soignants contaminés par le coronavirus. "Je ne suis pas certain qu’un décompte particulier parmi les soignants [testés positifs] soit une bonne idée", a-t-il déclaré lors d'une de ces conférences de presse quotidienne. En Espagne, 12% des cas confirmés sont des soignants.
Le directeur général de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), Martin Hirsch, a annoncé lors d'une conférence de presse ce vendredi que 345 soignants exerçant dans les établissements du groupe avaient été testés positifs au Covid-19, dont 3 sont hospitalisés et 2 se trouvent en réanimation.
Au CHU de Strasbourg, 238 soignants ont eux aussi été testés positifs au coronavirus. Le chiffre a doublé en quelques jours et la plupart des concernés sont encore au travail indique le quotidien. Huit patients ont également été contaminés au CHU de Tours et sont confinés à leur domicile.
Pour chaque cas, une enquête est réalisée dans l'entourage professionnel et personnel du soignant, afin de déterminer si d'autres personnes ont pu être contaminées. Des investigations difficiles à mener, tant le nombre de patients progresse rapidement chaque jour. "J’en suis à ma douzième journée, à quinze heures par jour, et demain j’y retourne", témoigne une cadre hospitalière au Monde.
Un chef de service du CHU de Colmar en réanimation
Même constat au CHU de Colmar, débordé par le travail. De nombreux soignants ont là aussi été contaminés par le Covid-19. Un chef de service de ce CHU se trouve en réanimation et son état s'est amélioré dernièrement raconte le quotidien, contrairement aux rumeurs qui ont circulé sur les réseaux sociaux, annonçant son décès.
Le dernier bilan du coronavirus en France est de 860 morts "en milieu hospitalier" et 2082 patients dans un état grave, en réanimation.